Jeudi 17 juillet 2014, les autorités mexicaines ont annoncé la récente observation d’une portée de loups du Mexique sauvages dans les montagnes de la Sierra Madre occidentale. Surnommée « lobo », cette sous-espèce du loup gris avait disparu dans la nature au Mexique il y a près de trois décennies. Après la mise en place d’un programme de sauvegarde, les premiers lâchers dans le pays avaient eu lieu en 2011. La commission nationale pour les aires naturelles protégées (CONANP) a tenu à souligner l’importance de cette découverte, ces louveteaux n’ayant eu aucun contact avec des humains.
Le loup du Mexique (Canis lupus baileyi) est originaire de la Sierra Madre occidentale et d’une région située à l’ouest de Mexico. Au début du XXème siècle, son aire de répartition s’étendait jusqu’au sud-ouest des États-Unis où, dès les années 1915-1920, les effectifs du « lobo » -chassé, piégé et empoisonné- ont dramatiquement chuté. Mêmes causes, mêmes effets à partir de la décennie 1930-1940 au Mexique.
Loup gris du Mexique en captivité au Sevilleta National Wildlife Refuge, au Nouveau-Mexique. Créé en 1973 à 80 kilomètres au sud d’Albuquerque, ce sanctuaire de 930 km2 fut choisi en 1995 comme site majeur duMexican Wolf Recovery Program afin de permettre aux loups captifs d’adopter un comportement sauvage et d’être isolés de tout contact avec les humains (photo Jim Clark, U.S. Fish and Wildlife Service).
Élevage en captivé
En 1976, le loup du Mexique est déclaré en danger par la Société américaine d'écologie. Et en 1982, l’United States Fish and Wildlife Service (FWS) lance un plan de sauvegarde (Mexican Wolf Recovery Plan) avec pour objectif de rétablir, grâce à un programme d’élevage en captivité, une population d’au moins cent loups dans l’aire de répartition traditionnelle de la sous-espèce.
Entre 1977 et 1980, quatre mâles et une femelle pleine sont ainsi capturés dans les États mexicains de Durango et Chihuahua. Trois d’entre eux ne sont pas apparentés. Ces cinq individus rejoignent quatre loups, également non apparentés, déjà hébergés en captivité. Les sept individus deviendront les fondateurs du programme de sauvegarde et de réintroduction.
Spécimen en captivité, ici en 1996 au Cincinnati Zoo and Botanical Garden dans l’Ohio. Inauguré en 1875, le deuxième plus vieux parc zoologique des États-Unis participe au programme de reproduction en captivité du loup du Mexique (photo Marumari).
En mars 1998, les premiers loups du Mexique sont relâchés dans les forêts nationales des Apache-Sitgreaves en Arizona. Les canidés recolonisent alors l’est de l’Arizona ainsi que le centre et le sud du Nouveau-Mexique, ces zones constituant la Blue Range Wolf Recovery Area.
Le spectre de la consanguinité
Fin 2012, la population de loups du Mexique sauvages aux États-Unis s’élevait à 75 individus. Publié en janvier 2014, le dernier rapport du FWS mentionne une hausse de 10,6 % avec 83 individus (46 au Nouveau-Mexique et 37 en Arizona) recensés fin 2013. Parmi eux, cinq couples définis comme reproducteurs par le FWS, à savoir un mâle et une femelle adultes accompagnés d’au moins deux louveteaux vivants au 31 décembre.
Toujours selon cette étude, des petits ont vu le jour l’année dernière dans au moins sept des 14 meutes identifiées et 17 louveteaux étaient toujours en vie fin 2013. Toutefois, la consanguinité de ces canidés, susceptible notamment de provoquer une mortalitéélevée des jeunes, inquiète les scientifiques. Fin 2012, le FWS dénombrait 92 loups morts depuis la première réintroduction en 1998. Les quatre animaux disparus en 2012 avaient tous été victimes de tirs illégaux !
Loup mexicain à l’Arizona-Sonora Desert Museum, à Tucson, en Arizona. Cet établissement est également impliqué dans la sauvegarde de la plus menacée des sous-espèces nord-américaines du loup gris (photo Cm0rris0n).
Un couple suivi de très près
En 2011, des loups du Mexique seront enfin relâchés sur leur terre originelle, dans l’État de Sonora à quelque 30 miles de la frontière avec les États-Unis. Réintroduit en décembre 2013 dans la Sierra Madre occidentale, un couple a notamment été suivi de près par les spécialistes du CONANP. Au printemps, le signal satellite du collier émetteur de la femelle cessa d’émettre durant quelques jours, suggérant que la femelle pouvait se trouver à l’intérieur d’une tanière avec ses petits. En mai, une équipe prit également un cliché de cette même femelle présentant des mamelles gonflées, indice d’un éventuel allaitement. Et en juin, une expédition dans la zone du relâcher permit de découvrir cinq louveteaux en bonne santé. Les premiers à voir le jour à l’état sauvage au Mexique depuis près de 30 ans !
Considérée comme la sous-espèce de loup la plus menacée en Amérique du Nord, le loup du Mexique est aussi la plus petite. Les adultes mesurent entre 1,20 et 1,50 mètre de long, pour une hauteur au garrot de 80 cm et une masse oscillant entre 30 et 40 kilos.
Voici le lien vers une vidéo tournée par CONANP pour célébrer cette naissance exceptionnelle, avec les images captivantes des cinq louveteaux dans leur environnement naturel : http://www.youtube.com/watch?v=JHW72IC15WI
Sources : United States Fish and Wildlife Service, CONANP TV, Livescience, AZA (Association of Zoos and Aquariums), Wikipédia.