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« Histoires remarquables, les insectes » : un envol dans le monde du « merveilleux vrai »

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Après les précédents ouvrages sur les mammifères puis les oiseaux, la collection « Histoires remarquables » des éditions Delachaux & Niestlé s’enrichit d’un nouveau titre consacré aux seuls insectes. Une exclusivité légitime, cette classe représentant 50 % de la biodiversité connue avec près d’un million d’espèces déjà décrites. Dotés de facultés d’adaptation fascinant les chercheurs, les insectes, ces « champions de la réussite biologique », possèdent en effet des mœurs complexes et trop souvent ignorées.

HISTOIRES REMARQUABLES LES INSECTES

Entomologiste, fondateur de l’association pour le développement des jardins sauvages ou naturels (PONEMA) et président de l’Office pour les insectes et leur environnement (OPIE), Vincent Albouy s’attache à combler cette lacune à travers près d’une trentaine d’exemples devant lesquels le lecteur reste pantois tant les stratagèmes des insectes pour se reproduire, échapper à leurs prédateurs ou capturer leurs proies, migrer, bâtir et protéger leur « royaume» ou encore conquérir tous les milieux de la planète - à l’exception notable des mers et des océans - sont incroyables. Bref, pour survivre sur les terres émergées depuis leur apparition, sans doute au Silurien voici 425 millions d’années. Bien avant l’apparition de l’Homme, laquelle ne serait peut-être jamais advenue sans les bousiers, ces coléoptères coprophages aujourd’hui décimés par les molécules de synthèses utilisées en médecine vétérinaire.

De la chenille écolo à la mouche allaitante !

L’ouvrage prend des allures de récit de voyages extraordinaires à la rencontre de l’écolo bombyx du mûrier, seul insecte vraiment domestiqué et recyclant un déchet toxique en produit de luxe, du papillon monarque dont la durée de vie varie selon les saisons, de la maternelle et redoutée mouche tsé-tsé allaitant son unique asticot, d’un pompile tueur de mygales, de lucioles jouant les naufrageuses à l’aide de signaux lumineux trompeurs ou encore d’un staphylin capable de droguer les fourmis.

L’auteur évoque aussi les mathématiques par le biais de la cellule hexagonale des ruches, figure géométrique utilisant un minimum de cire pour une contenance maximale, ou du cycle larvaire de quelques cigales recourant aux nombres premiers pour ne pas être décimées. Ce livre invite aussi à réfléchir et à repenser notre rapport aux insectes, alors qu’un sondage effectué en 2009 révélait que 69 % de nos concitoyens manifestaient du dégoût pour ces animaux. Pourtant, au XXIème siècle et  face à l’émergence de souches bactériennes résistantes aux antibiotiques, « l’asticothérapie » peut sauver bien des cas médicalement désespérés.

MONARQUES

La durée de vie moyenne d'un monarque (Danaus plexippus) atteint environ deux mois au printemps et en été, et s’élève entre sept et neuf mois pour la génération hivernante (photo Gene Nieminen, U.S. Fish and Wildlife Service).

Vincent Albouy aborde également les rivages de la crypto-zoologie grâce à un papillon malgache à la trompe démesurée dont Charles Darwin (1809-1882) avait eu l’intuition près d’un siècle et demi avant la première observation de son comportement butineur sur les fleurs d’Angraecum sesquipedale et réhabilite la cigale de la fable, mise à mal au XVIIème siècle par Jean de La Fontaine (1621-1695).

« Il ne se trouve nulle part autant de merveilleux, et de merveilleux vrai, que dans l’histoire des insectes », écrivait le physicien et naturaliste René-Antoine Ferchault de Réaumur dans ses Mémoires pour servir à l'histoire des insectes (1734-1742). Depuis, les découvertes des chercheurs ne cessent de le démontrer.

ALBOUY Vincent, DESBORDES François (illustrateur), Histoires remarquables, les insectes, Delachaux et Niestlé, avril 2015, 288 p., 17,90 €.


Voici 500 ans, le « rhinocéros de Dürer » posait le pied en Europe

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Il est sans doute le rhinocéros le plus célèbre de l’Histoire. Voici 500 ans jour pour jour, le 20 mai 1515, le « rhinocéros de Dürer » débarquait à Lisbonne au Portugal, en provenance d’Inde. L’animal avait été offert au roi Manuel Ier d'Aviz (1469-1521) par Muzaffar Shah II (1511–1526), sultan de Cambay, l’actuel État du Gujarat. Il devint le premier rhinocéros à fouler le sol européen depuis l’Antiquité, 1.200 ans plus tôt. Pour certains historiens, il s’agit même du premier rhinocéros indien (Rhinoceros unicornis) importé sur le Vieux Continent si l’on admet que les rhinocéros utilisés dans les arènes romaines étaient tous originaires d’Afrique.

1515 RHINOCERVS DE DURER

1515 RHINOCERVS, gravure sur bois par Albrecht Dürer, 1515, British Museum, Londres (Royaume-Uni).

Le cadeau royal avait quitté le port de Goa en janvier 1515 à bord de la Nossa Senhora da Ajuda. Le navire avait fait escale au Mozambique (ou à Madagascar selon les sources), puis à Sainte-Hélène et enfin aux Açores afin d’aborder la capitale portugaise. Pendant ce voyage en mer de quelque 120 jours, le rhinocéros aurait été nourri de paille, de foin et de riz cuit.

Opposéà un éléphant

Durant son séjour à Lisbonne, le rhinocéros fut hébergé dans la ménagerie royale du palais de la Ribeira, alors que les éléphants et les autres animaux de grande taille se trouvaient au palais Estaus. Le 3 juin 1515, dimanche de la Trinité, le souverain organisa un combat entre le rhinocéros et le plus jeune de ses éléphants, vraisemblablement un spécimen africain. Manuel Ier entendait vérifier l’affirmation de Pline l’Ancien (23-79) selon laquelle l’éléphant et le rhinocéros étaient de farouches ennemis. Une arène fut donc aménagée dans la cour s'étendant entre les appartements royaux du palais de la Ribeira et la Casa da Mina. Cet emplacement correspond à la place du Commerce, dans le quartier de Baixa. En fait, la confrontation tourna court : l’éléphant prit la poudre d’escampette à travers les rues pour se réfugier dans les écuries du palais Estaus.

À la fin de l’année 1515 et afin d’obtenir les bonnes grâces du souverain pontife, le roi du Portugal décida d’offrir son rhinocéros au pape Léon X (1475-1521). Manuel Ier  avait besoin du soutien papal pour valider les droits lusitaniens en Orient. L’année précédente, le souverain avait d’ailleurs fait don au pape d’un éléphant d’Asie qualifié de blanc par ses contemporains. Baptisé Hanno, ce pachyderme était devenu l’animal favori du pape.

L’éléphant blanc du pape

Né en Inde vers 1510, Hanno mourut le 8 juin 1516 à Rome, après avoir « bénéficié » d’un traitement laxatif contre la constipation à base de grandes quantités d’or. Après sa disparition et à la demande de Léon X, Hanno fut immortalisé grandeur nature par Raphaël (1483-1520) sur l’un des murs du Vatican. Cette fresque a aujourd’hui malheureusement disparu. Toutefois, une copie d’un dessin préparatoire de Raphäel, dont la paternité est généralement attribuée à Giulio Romano (1499-1546), nous est parvenue. Hanno servit aussi de modèle au peintre et architecte italien Giovanni da Udine (1487-1564), créateur de la fontaine de l’éléphant de la Villa Madame à Rome. Par ailleurs, l’écrivain et dramaturge Pierre l’Arétin serait l’auteur d’une brochure satirique intitulée Dernière volonté et testament de Hanno, raillant les mœurs de la cour de Léon X.

HANNO ET SON CORNAC CROQUIS D'APRES RAPHAEL

Croquis de Hanno et de son cornac, d'après Raphaël, c. 1516, Kupferstichkabinett (Cabinet des estampes), Berlin (Allemagne).

Naufrage fatal

Revêtu d’un tissu de velours vert décoré de roses, le rhinocéros royal embarqua en décembre 1515 sur le João de Pinaà destination de Rome. Début 1516, le navire fit escale à Marseille. À la demande du roi de France François Ier, le capitaine débarqua le rhinocéros le 24 janvier 1516 sur l’îlot d’If, dans la rade de Marseille. Le João de Pina reprit la mer vers Rome mais essuya une tempête au large de Porto Venere, près de La Spezia, sur la côte ligure, et se fracassa sur un écueil. Enchaîné sur le pont, le rhinocéros périt noyé.

Ici, sources et avis divergent. Selon les uns, son corps aurait été récupéré près de Villefranche-sur-mer. L’animal serait retournéà Lisbonne pour y être naturalisé avant de repartir vers Rome, où il aurait été présentéà Léon X en février 1516. Si tel fut le cas, le sort de l’animal empaillé reste un mystère. Il pourrait avoir été emporté par les Médicis à Florence ou avoir été détruit lors du sac de Rome en 1527 par les troupes de Charles Quint (1500-1558). Pour d’autres, cette hypothèse est peu crédible au regard des connaissances en taxidermie de l’époque. Le pape aurait simplement reçu un portrait grandeur nature de l’animal.

SALYANE

Salyane, femelle rhinocéros d’Inde née le 7 novembre 2013 au ZooParc de Beauval (41), ici à l’âge de 11 mois (photo Ph. Aquilon).

Un rhinocéros imaginaire

Albrecht Dürer (1471-1528) ne vit jamais le rhinocéros du roi Manuel Ier. Il dessina l’animal d’après le croquis d’un auteur anonyme et la description du combat que lui avait adressés à Nuremberg un correspondant vivant à Lisbonne. Dürer en fit d’abord un dessin à la plume et à l’encre. Baptisée RHINOCERON 1515, cette œuvre est conservée au British Museumà Londres (Royaume-Uni). La représentation du rhinocéros s’avère fantaisiste, avec la présence d’une petite dent de narval sur le dos de l’animal, d’une peau évoquant la carapace d’un crustacé et d’une queue ressemblant à celle d’un éléphant.

Afin de permettre une large diffusion de son dessin, Dürer réalisa peu après une gravure sur bois de 248 × 317 mm - 1515 RHINOCERVS, en inversant la position du pachyderme. Cette fois, les plaques de la carapace évoquent une armure métallique. Une thèse de doctorat publiée en 1996 propose la traduction suivante pour la légende de cette gravure, la date de 1513 étant une erreur de copie : « En l’année 1513 (sic) après la naissance du Christ, on apporta de l’Inde à Emmanuel, le grand et puissant roi de Portugal, cet animal vivant. Ils l’appellent rhinocéros. Il est représenté ici dans sa forme complète. Il a la couleur d’une tortue tachetée, et est presque entièrement couvert d’épaisses écailles. Il est de la taille d’un éléphant mais plus bas sur ses jambes et presque invulnérable. Il a une corne forte et pointue sur le nez, qu’il se met à aiguiser chaque fois qu’il se trouve près d’une pierre. Le stupide animal est l’ennemi mortel de l’éléphant. Celui-ci le craint terriblement car lorsqu’ils s’affrontent, le rhinocéros court la tête baissée entre ses pattes avant et éventre fatalement son adversaire incapable de se défendre. Face à un animal si bien armé, l’éléphant ne peut rien faire. Ils disent aussi que le rhinocéros est rapide, vif et intelligent. »

Un obélisque sur le dos

Une autre gravure du rhinocéros portugais fut réalisée à la même époque par Hans Burgkmair l’Ancien (1473-1531) à Augsbourg, en Bavière. Les œuvres des deux artistes allemands s’inspirent peut-être d’un même original. Toutefois, celle de Burgkmair - RHINOCEROS MDXV - se révèle plus réaliste que la gravure de Dürer. Le Graphisch Sammlung Albertina de Vienne (Autriche) détient l’unique exemplaire connu de cette gravure.

RHINOCEROS MDXV DE BURGKMAIR

RHINOCEROS MDXV, gravure sur bois par Hans Burgkmair, 1515, Graphische Sammlung Albertina, Vienne (Autriche).

La gravure de Dürer a connu un large succès à travers l’Europe. Entre quatre et cinq mille impressions auraient été vendues du vivant du peintre allemand dont l’œuvre fut copiée dès le XVIe siècle. Le rhinocéros de Dürer inspira également tapissiers et sculpteurs, parmi lesquels Jean Goujon (1510-1566), auteur d’une sculpture représentant l’animal portant un obélisque de 21 mètres sur son dos. Il faudra attendre le milieu du XVIIIe siècle, avec le débarquement le 22 juillet 1741 à Rotterdam (Pays-Bas) d’une femelle rhinocéros indien baptisée Carla, pour qu’une image plus réaliste de l’animal s’impose dans l’iconographie, même si les manuels scolaires allemands utilisèrent la gravure de Dürer pour représenter le rhinocéros indien jusqu’en 1938.

Réinterprété par Salvador Dalì

Pourtant, trois autres rhinocéros étaient arrivés jusqu’en Europe entre-temps. En 1577, un rhinocéros indien, sans doute une femelle, avait rejoint à Lisbonne la ménagerie du roi Sébastien Ier. Sa corne fut sciée par précaution. Lorsqu’en 1582, Philippe II réunit les couronnes espagnole et portugaise, il hérita de l’animal qui fut d’abord transféré dans la ménagerie de la Casa de Campo, près de Madrid. Puis, le 16 octobre 1583, le rhinocéros gagna la ménagerie royale de l'Escorial. Cet animal mourut probablement avant 1588. Son image nous est parvenue grâce à une gravure réalisée en 1586 par le Flamand Philippe Galle (1537-1612).

Un troisième individu, toujours originaire d’Inde, fut ramenéà Londres en janvier 1684. Il fut vendu pour 2.000 livres à un particulier et exposéà la Bartholomew Fair ou à l’auberge de la Belle Sauvage de Ludgate Hill. Le public payait 1 shilling pour l’admirer et 2 shillings pour le chevaucher ! Ce spécimen est considéré comme le premier rhinocéros « privé », ses prédécesseurs ayant tous appartenu à des souverains. Il s’éteignit en 1686.

RHINOCEROS TOILE DE JAMES PARSONS

Rhinoceros par James Parsons, 1739, Natural History Museum, Londres (Royaume-Uni).

Près d’un demi-siècle plus tard, un jeune rhinocéros indien mâle fut acheté par un dirigeant de la Compagnies des Indes britanniques à Patna, dans le nord-est de l'Inde. Arrivé sain et sauf à Londres le 1er juin 1739, il fut  présenté au public à partir du 15 juin àEagle Street. Mort en 1741, cet individu  attira l’attention des scientifiques anglais. La conférence de James Parsons (1705-1770) à la Royal Society le 9 juin 1743 fait figure de première étude scientifique de l’espèce. Ce médecin peignit également deux toiles représentant le jeune rhinocéros londonien. L’une disparut au XVIIIème siècle mais l’autre est toujours visible au muséum d’histoire naturelle de la capitale britannique.

SCULPTURE MONUMENTALE DU RINOCERONTE VESTIDO CON PUNTILLAS DE SALVADOR DALI

La sculpture monumental du Rinoceronte vestido con puntillas (« Rhinocéros habillé de dentelle ») de Salvator Dalì, dans la marina de Puerto Banús à Marbella, en Espagne (photo Manuel González Olaechea y Franco).

Immortalisé par l’un des plus grands artistes de son temps, le cadeau du roi Manuel Ier est devenu à jamais le « rhinocéros de Dürer ». Malgré sa courte et tragique existence, ce rhinocéros unicorne arrivé en Europe voici un demi-millénaire suscite toujours la fascination. La plasticienne Niki de Saint-Phalle (1930-2002) a ainsi revisité le chef-œuvre de Dürer en adaptant « son » rhinocéros sur divers supports, dont des bouées gonflables. Et de son côté, Salvator Dalì l’a habillé de dentelles et même transformé en Rhinocéros cosmique.

Le rhinocéros indien (Rhinoceros unicornis) est actuellement considéré comme « vulnérable » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Cette espèce est présentée dans cinq établissements zoologiques français : le Cerza(14), le zoo du bassin d’Arcachon (33), le ZooParc de Beauval (41), le parc animalier et botanique de Branféré (56) et Touroparc.zoo (71).

Sources : HUTCHINSON Alan, Cet étrange colosse. L’éléphant en Europe. Deux mille cinq cents ans d’histoire, Arléa, 2007, 288 p. Wikipédia.

« Cétacés du monde » : un précis scientifique de toutes les espèces connues

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Baleines, dauphins, marsouins… Tout le monde croit les connaître. Pourtant, rares sont ceux qui savent précisément quelles espèces de mysticètes - le sous-ordre des cétacés à fanons - et d’odontocètes - ceux à dents - se cachent derrière ces noms génériques si familiers. Publié aux éditions Quae, Cétacés du monde de Jean-Pierre Sylvestre relève tout à la fois du guide pratique permettant l’identification sur le terrain et du traité de vulgarisation scientifique. Du statut des populations aux caractéristiques biologiques des individus en passant par les dernières révisions taxonomiques, l’ouvrage présente par le détail les 87 espèces de cétacés actuellement (re)connues. Reporter-photographe et journaliste scientifique, son auteur réussit la gageure de s’adresser tout à la fois au grand public et à un lectorat plus pointu, soucieux de rigueur et de précision. Outre les dessins en noir et blanc avec vues latérale et dorsale illustrant chaque espèce, des planches photographiques complètent près de la moitié des présentations.

CETACES DU MONDE

Des mammifères souvent mystérieux

À l’heure où des chercheurs japonais tentent encore et toujours de justifier la chasse prétendument « scientifique » de la baleine, ce livre très documenté permet aussi de découvrir nos lacunes concernant l’état réel de conservation d’un grand nombre de cétacés. Ainsi, une espèce sur deux entre dans la catégorie « Données insuffisantes » de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Faute d’informations, il s’avère impossible d’évaluer directement ou indirectement le risque d’extinction planant sur ces animaux.

LAGENORHYNQUES SABLIERS

Dauphins à flancs blancs sabliers dans le détroit de Drake, séparant le cap Horn des îles Shetland du Sud. Également appelé lagénorhynque sablier ou lagénorhynque de Wilson, ce cétacé est l’un des odontocètes les moins connus à cause de son aire de répartition éloignée des grandes routes maritimes (photo Lomvi2).

Par ailleurs, la systématique reste confuse chez certains cétacés, même parmi les plus connus comme l’orque (Orcinus orca), dont les quatre écotypes sont susceptibles d’être considérés dans l’avenir comme des (sous-)espèces différentes. La reproduction et la longévité s’avèrent également peu documentées chez différentes espèces comme le cachalot nain (Kogia sima), le rorqual d’Omura (Balaenoptera omurai), la sotalie de Guyane (Sotalia guianensis) ou encore le dauphin à bosse de l’Atlantique (Sousa teuszii). Et il en va de même du comportement de bien des cétacés, parmi lesquels le rorqual à museau pointu nain – une espère non nommée actuellement, la baleine à bec de Gervais (Mesoplodoneuropaeus), le tasmacète de Sheperd (Tasmacetus shepherdi), le dauphin à flancs blancs sablier (Lagenorhynchus cruciger), l’orcelle australienne (Orcaella heinsohni)…

Quand les cétacés s’hybrident

Par ailleurs, l’ouvrage mentionne les hybridations relevées en milieu naturel comme en captivité, à l’instar par exemple du marsouin commun (Phocoena phocoena) avec le marsouin de Dall (Phocoenoides dalli) ou probablement du narval (Monodon monoceros) avec le béluga (Delphinapterus leucas). Quant au grand dauphin (Tursiops truncatus), hormis trois cas avérés en Irlande avec le dauphin de Risso (Grampus griseus), toutes les hybridations concernent des spécimens captifs avec, là encore, le dauphin de Risso, les dauphins communs à bec court et à bec long (Delphinus delphis et Delphinus capensis), le globicéphal tropical (Globicephala macrorhynchus), la fausse orque (Pseudorca crassidens), le sténo (Stenobredanensis), le grand dauphin de l’Indo-Pacifique (Tursiops aduncus), le lagénorhynque du Pacifique(Lagenorhynchus obliquidens) et un hybride entre grand dauphin et fausse orque (Tursiops x Pseudorca). Certains chercheurs évoquent aussi de possibles hybridations dans la nature avec le dauphin tacheté de l'Atlantique (Stenella frontalis).

NARVALS

La dent gauche des narvals mâles peut atteindre jusqu’à 2,7 mètres de long (photo National Institute of Standards and Technology, Glenn Williams).

État des lieux du savoir actuel sur les cétacés, ce guide permet non seulement de mieux connaître ces mammifères marins mais invite aussi au voyage en donnant une furieuse envie de les découvrir dans leur milieu naturel.

SYLVESTRE Jean-Pierre, Cétacés du monde. Systématique, éthologie, biologie, écologie, statut, Quae éditions, juin 2014, 320 p., 49,50 €.

Gibbon de Hainan : nouveau plan d’actions pour sauver l’un des plus rares primates au monde

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Avec une population totale estimée à 23-25 individus, le gibbon de Hainan (Nomascus hainanus) est aujourd’hui l’un des primates les plus menacés au monde. Pourtant, dans les années 1950, quelque 2.000 spécimens vivaient dans douze comtés au cœur des forêts tropicales de cette île située au sud de la Chine. Depuis, la fragmentation et la perte de leur habitat - associés à la chasse pour la médecine traditionnelle - ont conduit les gibbons au bord du gouffre. Selon un rapport de Greenpeace dévoilé en 2011, 22 % de la surface forestière a disparu sur Hainan entre 2001 et 2010. Et les plantations d’hévéas pour la récolte du latex ont remplacé les forêts d’eucalyptus prisées par les gibbons dont les ultimes représentants survivent désormais dans la réserve naturelle nationale de Bawangling, au centre-ouest de l’île.

Au début des années 1980, lors des premières études sur le terrain, le nombre de gibbons était estiméà 30 ou 40 spécimens dont sept seulement à Bawangling. Des populations isolées ont été repérées au cours des années 1980 dans d’autres zones forestières où elles ont sans doute survécu jusqu’à plus récemment. Néanmoins, les prospections entreprises depuis 2003 n’ont pas permis de localiser le moindre individu en dehors de la réserve de Bawangling.

FEMELLE GIBBON DE HAINAN ET SON PETIT

Femelle gibbon de Hainan avec son petit (avec l’aimable autorisation de l’auteur. Copyright Jessica Bryant).

Espèce cible

Regroupant près de 80 organisations non gouvernementales œuvrant pour la sauvegarde de la biodiversité, l’alliance pour zéro extinction (AZE) considère le primate endémique à Hainan comme une espèce cible. Malgré les initiatives lancées après un premier séminaire organisé en 2003, l’avenir du gibbon de Hainan reste très incertain à cause de son unique et petite population. La moindre épizootie, une recrudescence du braconnage, un ouragan ou une fluctuation temporaire du sex-ratio auraient des conséquences dramatiques pour l’espèce. La consanguinité et la perte de diversité génétique constituent également un danger majeur pour le gibbon de Hainan, susceptible d’être entraîné dans un phénomène baptisé spirale d'extinction.

Soucieuse de mettre en place des mesures de protection plus efficaces, la Société zoologique de Londres (ZSL), en collaboration avec les autorités de la réserve de Bawangling et le groupe chinois des spécialistes des primates de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), a donc organisé un second séminaire, du 18 au 20 mai 2014, dont la rapport final a été publié mardi 19 mai 2015. Les travaux ont notamment identifié cinq objectifs clés :

° protéger plus efficacement l’habitat des gibbons et accroître leur territoire grâce à des corridors dans la réserve.

° parvenir à augmenter la population de gibbons.

° suivre en permanence les animaux et mieux connaître les facteurs intervenant dans la dispersion des individus, la formation de nouveaux groupes et la colonisation de nouveaux habitats.

° créer un plan de secours en cas de situation de crise.

° améliorer la communication entre tous les acteurs de la sauvegarde de ce gibbon.

Passerelles artificielles
Au total, 12 champs d’intervention et 44 actions spécifiques ont été recensés avec divers degrés de priorité. Parmi elles figurent le développement de nouveaux habitats exempts de perturbations humaines, la pratique de l’agroforesterie, le déplacement d’individus pour former de nouvelles familles, l’implication des communautés locales ou encore la création de ponts artificiels dans la canopée reliant diverses portions de forêt. Dès cette année, plusieurs passerelles seront ainsi construites à la cime des arbres. Des défenseurs de l’environnement diffuseront également des enregistrements de chants de gibbons afin d’inciter les individus solitaires à rejoindre des secteurs non fréquentés par les singes, avec l’espoir d’assister à la formation de nouveaux groupes.

FORET TROPOCALE AU SUD DE HAINAN

Paysage de forêt tropicale au sud de l’île, dans un territoire actuellement inoccupé par les gibbons (photo Anna Frodesiak).

Croissance zéro

Actuellement, la population de gibbons de Hainan se limite à trois groupes sociaux (A, B et C) comptant uniquement cinq femelles en âge de se reproduire et une poignée d’individus solitaires, quatre au maximum. En outre, si la réserve de Bawangling s’étend sur deux comtés et environ 300 km2, les singes occupent un territoire restreint et très fragmenté de 15 km2, situéà une altitude relativement élevée au centre de la zone protégée. En dépit des mesures adoptées depuis 2003 et d’un taux de natalité apparemment normal, l’espèce ne présente pas une croissance démographique constante. Malgré la formation d’un troisième groupe social en 2011, les gibbons adultes échouent à former de nouveaux groupes après avoir quitté leur famille. Selon des recensements viables, la population globale a oscillé durant une trentaine d’années entre 15 et 25 individus, ne parvenant jamais à franchir ce dernier seuil. Cette apparente absence de croissance demeure non élucidée. Les scientifiques se demandent si les fluctuations constatées reflètent l’état réel de la population ou sont liées aux méthodes d’évaluation, voire à l’expérience des chercheurs.

Une classification longtemps incertaine

La taxonomie du gibbon de Hainan a, elle aussi, longtemps suscité le débat. La protection de ce primate a certainement souffert de cette confusion. Durant la majeure partie du siècle dernier, le gibbon de Hainan a été considéré comme un gibbon noir (Nomascus concolor), même si de nombreux auteurs estimaient qu’il s’agissait d’une sous-espèce insulaire. Plus récemment, il fut aussi assimilé au gibbon de Cao-Vit (Nomascus nasutus), endémique du Vietnam et appartenant à la liste des 25 primates les plus menacés au monde publiée en 2014. Curieusement, le gibbon de Hainan n’y figure d’ailleurs pas. La génétique a mis fin à la controverse et a permis au gibbon d’Hainan d’accéder au rang d’espèce à part entière. Elle a même révélé qu’il représentait une lignée assez ancienne dans la famille des Hylobatidae, ayant divergé des autres espèces de gibbons voici plus de trois millions d’années.

« L’assurance d’un avenir pour le gibbon de Hainan est l’une des priorités dans la conservation des mammifères », estime le Dr. Samuel Turvey, chercheur à la Société zoologique de Londres et co-président du séminaire de 2014. « Si des mesures adéquates sont prises maintenant, il n’est pas trop tard pour le sauver. J’espère que le gibbon de Hainan deviendra l’exemple d’une success story de la conservation. »

Pour consulter le rapport final du séminaire de 2014 : www.zsl.org/sites/default/files/media/2015-05/Hainan_Gibbon_Workshop_Report_FINAL_DRAFT_compressed.pdf

Sources : International Conservation Planning Workshop for the Hainan Gibbon - Final Report, Bo’ao, Hainan, China, 18 –20 March 2014, Société zoologique de Londres, The Guardian.

La Vallée des Singes : cinquième naissance chez les bonobos !

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Situéà Romagne dans la Vienne, le parc animalier de la Vallée des Singes vient d’obtenir une cinquième naissance au sein du plus grand groupe de bonobos (Pan paniscus) en captivité au monde. Ce dernier s’élève désormais à 20 individus.

Vendredi 22 mai 2015, Ulindi a en effet donné le jour à son second petit, un mâle. Le 23 mai 2013, cette femelle de 22 ans avait été transférée dans le Poitou avec son premier fils Loto, aujourd’hui âgé de 5 ans, en provenance du zoo allemand de Leipzig. Dès le premier jour, la mère et son rejeton sont sortis sur leur île couvrant plus d’un hectare.

ULINDI ET SON PETIT

Première sortie en extérieur pour Ulindi et son bébé (photo La Vallée des Singes / Marie Nussbaumer).

Le  4 août 2012, la Vallée des Singes était devenu le premier établissement zoologique français à enregistrer la naissance d’un bonobo.

Originaire des forêts équatoriales de la République démocratique du Congo, cet anthropoïde est classé« en danger » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Sa période de gestation dure 8 mois et demi. À sa naissance, le petit bonobo pèse environ 1 kilo.

Des tests ADN seront prochainement effectués afin de déterminer quel est le père du nouveau-né.

La Vallée des Singes est l’unique établissement hexagonal à héberger des bonobos, visibles du public depuis avril 2011. Les cinq premiers spécimens - la femelle Daniela et ses deux fils David et Diwani ainsi que le mâle Kirembo et une autre femelle baptisée Khaya - étaient arrivés dans la Vienne le 3 novembre 2009 en provenance du parc zoologique et botanique Wilhelma de Stuttgart, en Allemagne. Ils avaient ensuite été rejoints par Lingala, venue d’Apenheul, établissement néerlandais se trouvant à Appeldorn, puis début mai 2011 par deux femelles - Ukela et Nakala - et un jeune mâle dénommé Kélélé, originaires du zoo germanique de Francfort-sur-le-Main.

BONOBOS A LA VALLEE DES SINGES

Le groupe des bonobos de la Vallée des Singes en juin 2014 (photo Ph. Aquilon).

Le groupe se renforcera ensuite avec les transferts de Lucy - née et ayant vécu jusqu'en juillet 2012 au zoo de Jacksonville, en Floride aux États-Unis - depuis Leipzig, de Lisala et de son fils Luebo confiés par le zoo allemand de Wuppertal et du mâle Bondo vivant jusqu'alors au zoo de Francfort. Puis arriveront Ulindi et Loto... Côté naissances, Moko (le fils d'Ukela) et Kalhessi (fille de Khaya) ont vu le jour respectement le 4 août et le 12 décembre 2012. Le 14 juillet 2014, Lucy a mis au monde une femelle appelée Yuli. Enfin, le 21 septembre de la même année, Lingala est à son tour devenu mère d'une petite femelle du nom de Swahili.

Le programme d'élevage européen en captivité des bonobos est géré par le zoo belge d’Anvers.

Australie : une mystérieuse maladie décime une tortue d’eau douce

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Frappée par une mystérieuse épizootie, une tortue d’eau douce australienne (Myuchelys georgesi) a rejoint, en l’espace d’un mois, la trop longue liste des espèces menacées d’extinction. Jusqu’alors, ce chélonien endémique du fleuve Bellinger, en Nouvelle-Gallesdu Sud, n’était pourtant pas considéré comme étant en danger. Aujourd’hui, l’espoir de sauver l’espèce repose sur un petit nombre de survivants.

Les scientifiques australiens et étrangers s’interrogent sur les causes de cette maladie qui n’affecte pas l’homme et est dénommée par certains chercheurs septicémie cutanée ulcéreuse (Septicemic cutaneous ulcerative disease). D’abord léthargiques, les tortues infectées présentent ensuite de sévères lésions organiques, notamment sur les yeux.

UN SPECIMEN DE TORTUE DU FLEUVE BELLINGER - MYUCHELYS GEORGESI

Baptisée scientifiquement en l’honneur de l’écologue et herpétologiste australien Arthur Georges, Myuchelys georgesi est omnivore. Consommant plantes et insectes aquatiques, cette tortue présente une large rayure jaune le long de la tête et du cou et un plastron jaunâtre bordé d’un trait sombre (photo Sally Tsoutas/University of Western Sydney avec leur aimable autorisation).

Les premières tortues mortes ont été découvertes mercredi 18 février 2015 à proximité du fleuve par des canoéistes. Quelques jours plus tard, leur nombre s’élevait déjàà une cinquantaine. Début mars, une partie du parc national de la Nouvelle-Angleterre (New England National Park) était fermée par mesure de précaution. Selon les conclusions d’une étude publiée mi-mars, la maladie touchait alors plus de 60 % de l’habitat des tortues, soit une portion de 42 kilomètres du fleuve située entre Bishops Creeks à Darkwook et Lavenders Bridge à Bellingen. À cette date, environ 300 tortues mortes ou malades avaient été collectées. Fin avril, un nouveau communiqué du bureau de l’environnement et du patrimoine de Nouvelle-Gallesdu Sud précisait que l’épizootie affectait désormais 90 % de l’aire de répartition des tortues. Et si elle semblait absente du cours supérieur du fleuve, la maladie progressait vers l’amont.

Le spectre de l’extinction

À l’heure actuelle, plus de 400 cadavres ont été récupérés, de nombreuses autres tortues mourant quelques jours après avoir été ramassées. Incurable, cette maladie s’avère mortelle dans 100 % des cas, d’où la crainte de voir les tortues du fleuve Bellinger s’éteindre.

« Ce risque est bien réel et c’est tragique, assure le Dr Ricky Spencer, zoologiste et professeur associéà l'université occidentale de Sydney (UWS). Ce qui vient de se produire est très inquiétant. Un tel événement n’était jamais survenu en Australie. Comprendre ce qui est arrivé ici exigera peut-être des années. »

Les analyses effectuées à quatre emplacements-clés n’ont révélé aucune contamination du cours d’eau par des pesticides organophosphorés, des organochlorés, des pyréthroïdes ou des hydrocarbures. La nature de l’agent pathogène n’a toujours pas été identifiée.

VALLEE DU FLEUVE BELLINGER

Vue sur la vallée du fleuve Bellinger depuis une hauteur du parc national de la Nouvelle-Angleterre (photo Shiftchange).

« La seule chose que nous sachions vraiment est que cette maladie tue et tue vite. En un mois, ces tortues sont passées du statut de non menacées à celui d’espèce en danger, voire en danger critique d’extinction. Ces tortues vivent uniquement dans ce cours d’eau et nulle part ailleurs dans le monde. L’effondrement de cette population signifierait l’extinction de l’espèce. »

Pour tenter de résoudre le mystère, le Dr. Spencer a collaboré avec le bureau de l’environnement et du patrimoine, les parcs nationaux et le service de la faune et de la flore de Nouvelle-Galles du Sud, le zoo de Taronga à Sydney et plusieurs chercheurs étrangers. Parmi les hypothèses envisagées par les spécialistes figure celle d’un manque de nourriture ayant rendu les tortues vulnérables à diverses maladies. Rien n’est cependant avéré.

Élevage en captivité

Fin avril, 17 spécimens sains - dix mâles et sept femelles - ont été prélevés dans la nature afin d’initier un programme d’élevage en captivité sur lequel les scientifiques fondent de grands espoirs. « Cette initiative est très importante, souligne Ricky Spencer. Nous espérons obtenir des naissances et pouvoir libérer les nouveaux- nés dans une partie saine du fleuve. »

Selon le zoologiste australien, le taux d’éclosion élevé mais variable des œufs et l’importance mortalité juvénile des tortues étaient jusqu’alors compensés par la longévité de cette espèce, également très féconde. Or les activités humaines ont affecté cette stratégie de reproduction. Le taux de prédation des nids s’est envolé tandis que les adultes, longtemps peu menacés, sont désormais victimes du travail routier ou des renards. Par ailleurs, les tortues se noient dans les retenues d’eau régulant les zones humides, dans les filets des pêcheurs ou encore dans les pompes d’irrigation.

Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), 62 % des espèces de tortues d’eau douce sont aujourd’hui en danger à travers le monde.

LE DR

Pour le Dr. Ricky Spencer, les tortues d’eau douce sont de précieux indicateurs de l’état de santé des écosystèmes (photo Sally Tsoutas/University of Western Sydney avec leur aimable autorisation).

Signal d’alarme

« Les tortues du fleuve Bellinger consomment notamment des larves d’insectes très sensibles à la pollution et à la qualité de l’eau, note le Dr. Spencer. Si les chéloniens sont adaptés aux cycles naturels et capables de résister à des pénuries de nourriture, des famines chroniques pourraient cependant les affecter. »

Lors de la sécheresse australienne dite du millénaire entre 1995 et 2012, une vague de mortalité avait frappé deux espèces de tortues d’eau douce -la tortue à long cou (Chelodina longicollis) et la tortue du Murray (Emydura macquarii)- vivant dans les Lower Lakes (Australie-Méridionale), en raison d’une hausse du taux de salinité et de l’invasion de vers marins. Ces derniers se fixaient sur les tortues et les affaiblissaient jusqu’à provoquer leur noyade.

Les tortues d’eau douce jouent un rôle essentiel dans la santé des écosystèmes fluviaux en consommant les organismes en décomposition et en favorisant le recyclage des éléments nutritifs. Pour le Dr. Spencer, « l’extinction d’une espèce ayant survécu plusieurs millions d’années constituerait un signal d’alarme sur l’état de santé de notre environnement ».

Sources : The Guardian, The Conversation, bureau de l’environnement et du patrimoine de Nouvelle-Galles du Sud.

« Lunes de miel » : à la rencontre de l’ours sauvage dans les Balkans

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Une forêt enveloppée de brume, des traces de griffes sur l’écorce d’un arbre, un ourson inquiet surgissant derrière un tronc, une mère et son petit blanchis par une tempête de neige, une imposante silhouette saisie à contre-jour entre chien et loup ou le reflet d’un pelage éclairé par un rayon de lune… Témoins d’une quête s’étalant sur une vingtaine d’années au cœur de la Slovénie, les clichés du photographe suisse Jacques Ioset invitent au  voyage au fil du jour et au gré des saisons, de l’aube aux longues nuits de veille, du redoux printanier aux prémices de l’hiver.

LUNES DE MIEL A L'AFFUT DE L'OURS SAUVAGE

La rencontre de l’ours brun, animal emblématique des forêts européennes hantant notre imaginaire depuis des millénaires, suspend et symbolise tout à la fois le cours du temps, à l’instar de l’appareil numérique figeant en pixels l’instant fugitif, magique et fragile de la rencontre. Si le photographe n’a pas légendé ses clichés - généralement en couleurs, quelquefois en noir et blanc - offrant au lecteur un vagabondage dans la forêt slovène, il retrace en quelques pages deux décennies d’une aventure naturaliste - au départ - puis très vite également humaine.

La recherche de l’ours dans son milieu naturel conduit en effet Jacques Ioset et sa famille à la rencontre des villageois de cette région des Balkans et à une amitié, a priori improbable, avec Janez, piégeur de loirs et président des chasseurs locaux.

Ici, l’ours est encore chassé. Pourtant, un personnage étonnant, chargé d’abattre un plantigrade blessé par un chasseur étranger maladroit, livre au détour d’une sapinière cette réflexion tellement d’actualitéà l’heure où le retour du loup et la survie du lynx comme de l’ours génèrent tant de polémiques et de controverses : « Il n’y a pas d’ours problématiques, seulement des gens qui ne savent pas cohabiter avec les ours !». Cet ouvrage en témoigne.

IOSET Jacques, Lunes de miel. À l’affût de l’ours sauvage, La Salamandre, septembre 2014, 160 p., 45 €.

Planète Sauvage lance son association de conservation

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Parc animalier situéà Port-Saint-Père en Loire-Atlantique, Planète Sauvage lance ce samedi 27 juin 2015 son association Planète Sauvage Nature destinée à soutenir plusieurs actions de conservation in situ et à sensibiliser le grand public à la protection de la biodiversité. À cette occasion, l’établissement zoologique propose, samedi 27 et dimanche 28 juin 2015, diverses animations mettant en lumière les menaces planant sur l’avenir de la faune sauvage.

PLANETE SAUVAGE

Planète Sauvage Nature soutiendra notamment le Sahara Conservation Fund (SCF), l’association européenne pour l’étude et la conservation des lémurs (AEECL) et le Fundimvelo Thula Thula Rhino Orphanage.

Lancée en 2004, le SCF gère six projets dans cinq pays au Sahara et au Sahel. Elle intervient notamment dans la plus vaste aire protégée africaine, la réserve de Termin et Tin-Toumma au Niger. À cheval sur divers milieux – le désert, la steppe, la plaine et la montagne aride, la réserve abrite les dernières populations stables de gazelles dama (Gazella dama) et d’addax (Addaxnasomaculatus), deux espèces classées en danger critique d’extinction par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Créée à la fin des années 1990 par l’université de Strasbourg, le parc zoologique et botanique de Mulhouse et les zoos allemands de Cologne et Sarrebruck, l’AEECL se consacre à la sauvegarde des plus rares lémuriens. 93 des 105 espèces de lémuriens, toutes endémiques de Madagascar, sont aujourd’hui menacées à cause de la déforestation et du braconnage. L’AEECL veille en particulier sur le dernier refuge des lémurs aux yeux turquoise ou lémurs de Sclater (Eulemurflavifrons), dans la péninsule de Sahamalaza, au nord-ouest de l’île. Également en danger critique d’extinction, le lémur aux yeux turquoise - longtemps considéré comme une sous-espèce du lémur noir et désormais érigé au statut d’espèce à part entière – figure sur la liste des 25 primates les plus menacés de la planète.

PROGRAMMES

 

Enfin, l’orphelinat des rhinocéros a été inauguré en septembre 2014 au cœur de la réserve de Thula Thula fondée par Lawrence Anthony dans la province du Kwazulu Natal, située dans l’est de l’Afrique du Sud (voir http://biofaune.canalblog.com/archives/2014/03/02/29326009.html). Cette structure est susceptible d’abriter jusqu’à 20 jeunes rhinocéros. Selon le ministère de l'Environnement sud-africain, 1215 rhinocéros ont été abattus dans ce pays en 2014 par des braconniers. Près du tiers des animaux tués sont des mères gestantes ou élevant un petit. Le Rhino Orphanage accueille les orphelins récupérés dans les réserves sud-africaines, leur prodigue les soins nécessaires et les équipe de colliers-émetteurs. Sous la surveillance de gardes, les animaux sont ensuite relâchés dans la réserve.

Voici les liens vers les sites de ces trois programmes de conservation :

°www.saharaconservation.org

°www.aeecl.org (et une vidéo en anglais pour découvrir le travail de l’AEECL www.youtube.com/watch?v=lU_NpOK8h9c)

°www.thulathula.com


Bioparc de Doué-la-Fontaine : une nouvelle « Journée de la conservation » mercredi 8 juillet 2015

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Le Bioparc de Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire) organisera, mercredi 8 juillet 2015, sa deuxième « Journée  de la conservation », destinée à souligner son engagement en faveur de la biodiversité.

Sur la terrasse des loutres géantes, une exposition consacrée aux « Projets Nature » présentera quelques-unes des actions soutenues - via des associations locales - par le Bioparc comme au Niger pour la protection des girafes « blanches » (Giraffa camelopardalisperalta), au Pérou afin de préserver la forêt sèche ou encore en Bulgarie et en France avec la restauration des populations de vautours. Des membres des associations Kalaweit et Sylvatrop seront d’ailleurs présents tout au long de l’après-midi et détailleront aux visiteurs la nature de leur combat pour sauver les gibbons et les hippopotames pygmées.

JOURNEE DE LA CONSERVATION

(Photo Pierre Chabot / Bioparc de Doué-la-Fontaine)

Depuis bientôt 15 ans, via ces initiatives et grâce au fonds de dotation « Bioparc Conservation », le zoo créé en 1961 par Louis Gay s’engage sur le terrain pour protéger les écosystèmes et les espèces menacées. En 2015, l’établissement angevin soutient ainsi 20 projets pour un montant total d’environ 200.000 €, une somme en partie prélevée sur les bénéfices du parc et complétée grâce à des dons.

Séquoia et laiton

Durant cette journée, des salariés de l’équipe du Bioparc convieront aussi les visiteurs àécouter de courtes histoires sur leurs voyages à travers le monde. Ici il sera question de l’inauguration d’un barrage, là de la mise en place de micro-crédits…

Par ailleurs, dans le cadre du rendez-vous « De la Sculpture à la Nature » proposé depuis plusieurs étés, les artistes nigériens Omar Sekou et Dello Haino dévoileront leur art au public en façonnant de monumentales statues animalières dans des troncs de séquoia et en fabriquant de petites silhouettes animales en laiton. Ces dernières seront vendues au profit de l’Association pour la Sauvegarde des Girafes du Niger (ASGN).

Cette journée marquera aussi le lancement officiel du parrainage des pensionnaires du Bioparc. En parrainant pour une somme minimale de 30 € par an l’animal de leur choix, les visiteurs pourront suivre son quotidien au sein du Bioparc et œuvrer à la protection de son espèce en milieu naturel.

Informations complémentaires sur le site du Bioparc : www.bioparc-zoo.fr

Il y a 20 ans, l’aigle des singes devenait l’emblème des Philippines

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Voici 20 ans, le 4 juillet 1995, l’aigle des Philippines (Pithecophaga jefferyi) était érigé au rang d’emblème national lors de la réélection du président Fidel Valdez Ramos. Et le 24 février 1999, son successeur José Marcelo Ejército décrétait que la période du 4 au 10 juillet deviendrait chaque année la « semaine de l’aigle des Philippines ».

AIGLE DES PHILIPPINES

Spécimen captif élevé au Philippine Eagle Center en 2009 (photo scorpious18).

Atteignant jusqu'à 2,50 mètres d’envergure, ce rapace - le deuxième plus grand aigle au monde après la harpie féroce (Harpia harpyja) - est classé« en danger critique d’extinction » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Le pithécophage des Philippines est couramment appelé aigle des singes à cause de son régime alimentaire, composé notamment de macaques crabiers (Macaca fascicularis). Cet aigle dont la masse oscille entre 4,5 et 8 kilos se nourrit également d’autres oiseaux comme les calaos ou les hibous, de civettes palmistes (Paradoxurus hermaphroditus), d’écureuils volants, de galéopithèques (Cynocephalus volans), de chauves-souris frugivores, de rats ou encore de serpent et de varans. Selon certaines sources, il serait même capable de chasser de petits sangliers ou de jeunes cerfs des Philippines, voire des chiens !

L’espérance de vie de cet impressionnant rapace, sexuellement mature à cinq ans pour les femelles et à sept pour les mâles, se situe entre 30 et 60 ans. La longévité des oiseaux sauvages semble en moyenne plus courte que celle de leurs congénères captifs.

Déforestation et braconnage

Unique représentant du genre Pithecophaga - aucune sous-espèce n’étant d’ailleurs reconnue - et seul rapace aux yeux gris-bleu, l’aigle des singes souffre de la destruction et de la fragmentation de son habitat à cause des exploitations forestière et minière, et du défrichement pour les cultures. Il est également victime du braconnage et des pièges à collet destinés à d’autres animaux. Tuer ce rapace est pourtant punissable d’une peine allant jusqu’à 12 ans de prison et de fortes amendes. Cet aigle à l’imposante crête érectile subirait aussi les effets de la pollution liée aux pesticides.

L’aire de répartition de l’espèce, endémique des Philippines, se limite aux deux plus grandes îles de l’archipel - Luçon et Mindanao - et à celles de Samar et Leyte dans les Visayas. Peuplée par une forte minorité musulmane en rébellion contre le gouvernement, l’île de Mindanao abrite la plus importante population d’aigles, estimée entre 82 et 233 couples.

AIGLE DES PHILIPPINES EN CAPTIVITE

Aigle des Philippines photographié en 2013 au Ninoy Aquino Parks & Wildlife Center, établissement zoologique spécialisé dans la faune endémique et situé dans la ville de Quezon (photo Ramon FVelasquez).

Centre de reproduction

Aujourd’hui, le nombre total d’oiseaux en âge de se reproduire oscillerait entre 180 et 750 individus. Depuis 1987, la Philippine Eagle Foundationœuvre pour la sauvegarde de l’aigle des singes et de son habitat. Établi à Davao, la capitale de Mindanao, le Philippine Eagle Center héberge actuellement 36 aigles des Philippines dont 18 nés en captivité. En 1992, deux premiers aiglons, conçus par insémination artificielle, y ont vu le jour. La première reproduction naturelle a eu lieu en 1999.

PHILIPPINE EAGLE FUNDATION

En 2004, un aigle né en captivité et baptisé Kabyan fut relâchéà Mindanao. Il mourut électrocuté le 9 janvier 2005 dans le parc naturel du mont Apo. Un second oiseau, un mâle de trois ans dénommé Kagsabua et secouru après avoir été blessé par une arme à feu, retrouva le milieu naturel le 6 mars 2008. Quatre mois plus tard, il fut abattu par un chasseur ! De nouveaux programmes de réintroduction sont envisagés.

Disparu des zoos occidentaux

Aujourd’hui, aucun aigle des singes ne serait élevé en captivité en dehors des Philippines. Par le passé, une cinquantaine de spécimens ont été détenus dans des zoos européens, américains et japonais. Le premier est sans doute une femelle arrivée le 31 août 1909 au zoo de Londres (Royaume-Uni) où elle est morte le 11 février 1910. La plupart des oiseaux ont été hébergés dans les établissements concernés entre 1947 et 1965. La Ménagerie du Jardin des plantes à Paris accueillit ainsi un aigle des Philippines mâle du 30 juin 1961 au 7 avril 1966. Cet individu, aujourd’hui naturalisé et conservé au Muséum national d'histoire naturelle de Paris, est mort étouffé par un morceau d’os coincé dans sa trachée.

COUPLE D'AIGLES DES PHILIPPINES AU ZOO D'ANVERS

Le zoo d’Anvers a possédé plusieurs aigles des singes dont une femelle du 27 mai 1963 au 7 juillet 1977 et un mâle entre 1964 et 1988. Vraisemblablement immortalisé sur ce cliché extrait d’un guide du zoo flamand, ce couple fut également présenté au parc animalier de Planckendael près de Malines (Coll. personnelle).

Le record de longévité en captivité est certainement détenu par un autre mâle ayant vécu 41 ans et 7 mois au zoo de Rome (Italie), du 1er décembre 1934 au 5 juillet 1976. Déjà mature, cet oiseau avait été donné au zoo de la capitale italienne à l’occasion de sa réouverture par l’ornithologue franco-américain Jean Delacour (1890-1985), président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) de 1921 à 1976 et créateur du parc zoologique de Clères en Seine-Maritime. Jack, le dernier des ces aigles captifs, s’est éteint le 18 janvier 1988 au zoo d’Anvers (Belgique), où il avait été transféré le 7 mai 1964.

Désormais, l’avenir de ce rapace magnifique dépend de celui des anciennes forêts pluviales philippines. Selon certains experts, il subsiste à peine 3,2 % de la surface originelle de la forêt tropicale humide. Et le taux de déforestation, parmi les plus élevés au monde, dépasse les 2 % par an dans l’archipel…

Sources : Philippine Eagle Foundation, International Zoo News, L’Oiseau mag, Wikipédia.

Une nouvelle famille de gibbons de Hainan découverte par Chanee

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Dans un communiqué publié mardi 14 juillet 2015 par l’association Kalaweit, son fondateur Aurélien Brulé, alias Chanee, annonce avoir identifié une quatrième famille de gibbons de Hainan (Nomascus hainanus), en Chine. Jusqu’alors inconnue, celle-ci se compose d’un couple et de son petit et devient le groupe D.

Cette découverte a eu lieu le 17 juin 2015 lors d’une mission menée sur l’île chinoise avec une équipe de la Société zoologique de Londres (ZSL) et la collaboration des gardes de la réserve nationale de Bawangling. Afin de trouver d’éventuels nouveaux gibbons dans leur milieu naturel, les scientifiques ont eu recours à une méthode mise au point par l'association Kalaweit à l'aide de « chants » de gibbons préenregistrés.

« J’étais seul en forêt et suivais les vocalises d’un mâle lorsque j’ai eu la chance d’apercevoir cette famille et de passer une heure avec elle», explique Chanee. « Je ne peux pas vous décrire ma joie lorsque j’ai trouvé ces animaux. Aucune famille de gibbons de Hainan n’avait été découverte depuis de nombreuses années ! »

Avec une population totale estimée à 23-25 individus, le gibbon de Hainan (Nomascus hainanus) est aujourd’hui l’un des primates les plus menacés au monde (voir http://biofaune.canalblog.com/archives/2015/05/26/32113038.html).

Une vidéo de cette rencontre exceptionnelle est visible à l'adresse suivante : www.dailymotion.com/video/x2xxjvv_video-new-hainan-gibbon-group-found-decouverte-de-nouveaux-gibbons-de-hainan_animals?start=9

Les tigres bientôt réduits à deux sous-espèces ?

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Si le nombre de tigres (Panthera tigris) vivant à l’état sauvage sur la planète a chuté de 97 % en l’espace d’un siècle, celui des sous-espèces pourrait à son tour diminuer. Une nouvelle étude -très controversée- menée par des chercheurs du Leibniz Institute for Zoo and Wildlife Research (IZW) à Berlin suggère en effet de classer les tigres en deux sous-espèces seulement, contre neuf actuellement. Si elles étaient validées, les conclusions de cette recherche auraient un impact important sur les programmes de conservation du grand félin asiatique. Chaque année, près de 45 millions d’euros sont dépensés pour la sauvegarde de l’espèce dans son milieu naturel.

Dans un article publié vendredi 26 juin 2015 dans la revue Science Advances, les auteurs de ces travaux proposent de revoir la taxonomie en vigueur et de limiter à deux le nombre de sous-espèces, avec d’un côté le tigre des îles de la Sonde -regroupant les tigres de Sumatra et ceux disparus de Java et de Bali- et de l’autre le tigre continental qui regrouperait les six autres sous-espèces actuellement admises.

COUPLE DE TIGRES INDOCHINOIS

Couple de tigres d’Indochine en mai 2012 au jardin zoologique de Berlin-Friedrichsfelde, en Allemagne (photo Lotse).

Trois sous-espèces déjàéteintes

Aujourd'hui, les quelque 3.200 à 3.600 tigres survivant dans la nature, disséminés sur 7 % de leur aire de répartition originelle, sont classés au sein de six sous-espèces : les tigres du Bengale (Panthera tigris tigris), de Sibérie (P. t. altaica), d'Indochine (P. t. corbetti), de Malaisie (P. t. jacksoni), de Sumatra (P. t. sumatrae) et de Chine du Sud (P. t. amoyensis). Les cinq premières sont répertoriées en danger d’extinction par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), la dernière étant identifiée en danger critique.

Bien qu’admis par l’UICN comme P. t. jacksoni, le tigre de Malaisie n’aurait pas fait l’objet d’une description formelle correspondant aux exigences du Code international de nomenclature zoologique et relèverait donc du nomen nudum.

Trois autres sous-espèces -les tigres de Bali (P. t. balica), de la Caspienne (P. t. virgata) et de Java (P. t. sondaica)- sont considérées comme éteintes depuis respectivement 1937, la fin des années 1970 et la décennie 1980.

TIGRES DE MALAISIE ET DE CHINE DU SUD

À gauche, un tigre de Malaisie en mai 2010 au Zoo Negara, près de Kuala Lumpur (photo Tu7uh). À droite, un spécimen de tigre de Chine du Sud en 2011 au zoo de Shanghai (photo J. Patrick Fischer).

Os, poils et génétique

Lors de leurs travaux, les scientifiques ont comparé les dimensions de 201 crânes (102 mâles et 99 femelles), les motifs de 114 pelages (grâce à des photos), l’environnement écologique (conditions climatiques, nature des proies…) et bien sûr les critères génétiques des différentes sous-espèces. Ils ont utilisé des données déjà publiées et en ont collecté de nouvelles grâce à des spécimens de sous-espèces éteintes conservés dans des musées.

Pour ces chercheurs, il existe peu d’arguments solides à même de justifier la répartition des tigres en neuf sous-espèces. « Certes, nous avons trouvé des différences génétiques entre celles-ci, admet Andreas Wilting, l’un des auteurs de cette étude. Néanmoins, en considérant l’ensemble des caractères pris en compte, il ne devient sérieusement possible que de distinguer deux sous-espèces. » Lesquelles seraient scientifiquement baptisées Panthera tigris tigris et P. t. sondaica.

TIGRES DES ILES DE LA SONDE

Groupe de tigres en captivité au zoo suisse de Bâle. Ces individus sont « simplement » présentés comme des tigres des îles de la Sonde (coll. personnelle).

Des travaux « convaincants »

Coprésident du Groupe de spécialistes des félidés à la Commission de la sauvegarde des espèces de l’UICN, Urs Breitenmoser estime ces travaux très convaincants et « conformes à d’autres découvertes effectuées ces dernières années ». En 2012, le Groupe de spécialistes des félidés avait chargé une équipe de travail de mettre à jour la taxonomie de tous les félins sauvages. Les résultats sont attendus pour la fin de l’année 2015 et cette nouvelle proposition « sera examinée », assure M. Breitenmoser.

Selon l’équipe de l’IZW, les analyses d’ADN mitochondrial indiqueraient, en cohérence avec les données relatives à l’ADN nucléaire, que la diversité génétique des tigres contemporains serait moindre que celle d’autres panthérinés et félins du Sud-Est asiatique.

Publiée dans la revue PLoS ONE en 2009, une étude menée sur les haplotypes d'ADN mitochondrial de 20 tigres de la Caspienne appartenant à des musées avait conclu à l’étroite proximité de cette sous-espèce disparue avec l’actuel tigre de Sibérie (P. t. altaica). Des analyses phylogéographiques complémentaires avaient établi que le plus proche ancêtre commun de ces deux sous-espèces remontait à seulement 10.000 ans. Originaire de l'est de la Chine, ce dernier aurait colonisé l'Asie centrale à la fois par la Sibérie et le corridor du Hexi, passage situé entre le plateau tibétain et le désert de Gobi.

En 2015, une autre recherche moléculaire parue dans le Journal of Heredity a mis en évidence le voisinage génétique des tigres de Bali et de Java avec celui de Sumatra.

TIGRE DE SUMATRA

Mâle tigre de Sumatra au zoo d’Amnéville (Loir-et-Cher) en août 2014 (photo Ph. Aquilon).

Les experts divisés

Toutefois, les conclusions des chercheurs de l’IZW sont loin de faire l’unanimité. Pour Stephen O’Brien, généticien au centre Theodosius Dobzhansky pour la bioinformatique génomique de Saint-Pétersbourg (Russie) et dont certaines découvertes génétiques ont été utilisées pour l’étude, « les tigres continentaux présentent suffisamment de différences génétiques pour être répartis en six sous-espèces». En revanche, « la réunion des trois sous-espèces des îles de la Sonde au sein d’une seule est envisageable », a-t-il déclaré au site News Sciencemag.

Des fossiles ont révélé la présence des tigres durant près de 2 millions d’années dans de nombreuses régions du continent asiatique. D’après certaines études génétiques, les tigres auraient été décimés voici quelque 80.000 ans à la suite de l’éruption explosive du volcan Toba, sur l’île indonésienne de Sumatra. Une petite population aurait néanmoins survécu à la catastrophe, possiblement en Chine méridionale. Les variations génétiques de leurs descendants se seraient ainsi produites au cours des 80 derniers millénaires. Une durée suffisante pour que les sous-espèces puissent être distinguées génétiquement mais non morphologiquement selon Shu-Jin Luo, généticienne de l’université chinoise de Pékin et spécialiste des espèces en voie d’extinction. « Les données génétiques s’avèrent beaucoup plus fiables et objectives que les considérations morphologiques », souligne la scientifique dans les colonnes de News Sciencemag. Sceptique sur les conclusions de cette nouvelle étude, Shu-Jin Luo défend ainsi le classement des tigres en neuf sous-espèces sur la foi des critères génétiques.

TIGRE DU BENGALE

Tigre royal -ou tigre du Bengale- sauvage dans le parc national de Ranthambore, dans l’État indien du Rajasthan en avril 2010 (photo Bjørn Christian Tørrissen).

Vers une nouvelle gestion des programmes de conservation ?

« L’exemple du tigre démontre comment l’accroissement des données phylogénétiques et les controverses taxonomiques peuvent affecter les plans de gestion et les priorités de conservation », soutiennent les chercheurs de l’IZW.

Outre la reclassification des tigres en deux sous-espèces, ils préconisent donc une refonte des programmes de conservation avec, pour les tigres continentaux, deux gestions distinctes : l’une pour les tigres du nord dits de l’écotype 1 (tigres de Sibérie et de la Caspienne), l’autre pour ceux du sud ou de l’écotype 2 (tigres du Bengale, de Chine du Sud, d’Indochine et de Malaisie). Pour ces scientifiques, les différences moléculaires, de structures crâniennes chez les mâles, de pelage et de caractères écologiques ainsi que la distance séparant leurs habitats actuels justifient cette scission entre tigres continentaux. Néanmoins, ils récusent la reconnaissance d’une sous-espèce septentrionale : dans l’arbre phylogénétique, les tigres du nord constitueraient un « sous-clade » du groupe continental et une sous-espèce méridionale serait alors paraphylétique.

Quant à l’absence de tigres en Chine du Nord, ils la croient liée à une surexploitation humaine remontant à une époque lointaine et refusent par conséquent d’attribuer une importance excessive aux caractères distinctifs des tigres septentrionaux.

TIGRE DE SIBERIE

Tigre de Sibérie au Safari de Peaugres, en Ardèche, en mai 2015 (photo Ph. Aquilon).

Une approche « pragmatique »

Là encore, les conséquences d’une nouvelle taxonomie de Panthera tigris sur les programmes de sauvegarde divisent les experts.

Pour les partisans de la révision, la variabilité génétique sera la clef de l’adaptabilité des tigres aux futurs changements environnementaux. Qualifiant leur approche de « pragmatique », ils mettent notamment en avant des simulations coalescentes publiées en 2013, selon lesquelles, en l’absence d’échanges entre les sous-espèces actuellement reconnues, la diversité génétique des tigres ne pourrait être maintenue.

Concernant d’éventuels (re)lâchers dans la région de la Caspienne et dans l’ensemble de l’Asie du Nord-Est, les auteurs de l’étude estiment légitime de se limiter au seul tigre de Sibérie. De même à Sumatra, Java et Bornéo avec le tigre de Sumatra. Pour l’Asie continentale du Sud-Est, ils recommandent que la priorité soit accordée aux spécimens originaires de moins de 1.000 km de la zone de réintroduction, c’est-à-dire la distance maximale de dispersion des tigres et par conséquent du brassage génétique.

TIGRE DE LA CASPIENNE

Spécimen de tigre de Perse, également appelé tigre de la Caspienne ou tigre de Touran, au zoo d’Anvers, en Belgique. Cette sous-espèce est considérée comme éteinte (coll. personnelle).

Le réservoir des « hybrides » captifs

Pour Volker Homes, spécialiste de la conservation pour le Fonds Mondial pour la Nature (WWF) en Allemagne, une telle classification simplifierait les mesures de conservation dont l’un des objectifs consiste à doubler la population de tigres sauvages d’ici à 2022. Ainsi, les tigres du Bengale, dont le nombre dépasserait aujourd’hui les 2.200 spécimens en Inde, selon une étude publiée au début de l’année 2015 mais dont la validité statistique fait néanmoins débat (1), permettraient de restaurer la population du tigre de Chine méridionale (P. t. amoyensis), vraisemblablement éteint à l’état sauvage.

Le cas échéant, des milliers de tigres maintenus en captivité  et fruits du croisement entre sous-espèces pourraient participer aux plans d’élevage ex situ. Pour les chercheurs de l’IZW, le recours à ces tigres continentaux du sud, jusqu’ici considérés comme des « hybrides sous-spécifiques », favoriserait la persistance d’allèles survivant peut-être seulement chez ces individus. Encore conviendrait-il de s’assurer de la lignée de ces félins. Une gageure dans bien des cas.

TIGREAU HYBRIDE

Un tigreau « hybride » au zoo de la Boissière-du-Doré en août 2014 (photo Ph. Aquilon).

En Europe, deux programmes d’élevage (EEP) sont menés sous l’égide de l’association européenne des zoos et des aquariums (EAZA). Consacrés aux tigres de Sibérie et de Sumatra, ils ont été initiés respectivement en 1985 et 1990. Tous deux sont gérés par le zoo de Londres, au Royaume-Uni.

Pour autant, une reclassification  pourrait avoir des conséquences négatives, avertit M. Holmes, évoquant la fierté de certains États à abriter sur leur territoire une sous-espèce unique. « Le risque existe que certains pays se sentent moins concernés et diminuent leurs efforts de sauvegarde s’il n’était plus question de leur tigre. »

Au-delà du débat scientifique, les enjeux de cette possible révision taxonomique concernent ainsi la sauvegarde de l’une des espèces les plus emblématiques de la faune sauvage. Les décisions que prendra le Groupe de spécialistes des félidés de l’UICN sont d’ores et déjà très attendues.

(1)  www.worldwildlife.org/stories/india-reports-nearly-30-rise-in-wild-tiger-population

Sources : Science Advances, News Sciencemag, PLoS ONE, Journal of Heredity, Wikipédia.

 

Vidéo : la 6ème extinction de masse en 90 secondes

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Selon une étude publiée vendredi 19 juin 2015 dans la revue Science Advances, la Terre connaît actuellement sa sixième extinction de masse.

Réalisée par Universcience, une vidéo pédagogique explique en une minute et demie l’enjeu pour la faune et la flore de notre planète. Sur 1,8 million d’espèces animales et végétales recensées, 20.000 sont considérées comme menacées par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Les espèces animales disparaissent environ 100 fois plus vite que par le passé. Jamais, depuis la dernière extinction de masse au Crétacé-Tertiaire (ou extinction K-T) voici 65 millions d’années, la planète n’a perdu ses espèces animales à un rythme aussi effréné…

Une vidéo à partager et à diffuser dans toutes les classes dès la rentrée, l’éducation au développement durable et l’organisation de débats dans la perspective de la 21e conférence des parties (COP21) prévue du 30 novembre au 15 décembre 2015 à Paris figurant parmi les exigences et recommandations du ministère de l'éducation nationale.

www.dailymotion.com/video/x2wgurn_les-especes-menacees_news?start=90

Micmac au Bioparc : enquête policière au zoo de Doué-la-Fontaine (49)

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Drôle d’endroit pour un homicide ! Décor fantastique creusé dans le falun, la vallée des rhinocéros noirs du Bioparc de Doué-la-Fontaine devient, sous la plume du romancier Gino Blandin, le théâtre d’une mort brutale et inexpliquée. En pleine saison, l’établissement est fermé par la Préfecture du Maine-et-Loire ! À la réouverture du zoo quelques jours plus tard, le mystère s’épaissit. Une jeune journaliste du Courrier Ligérien est étonnée par l’étrange comportement de touristes devant l’enclos des panthères des neiges, aménagé dans le « canyon des léopards ». Ces visiteurs ont traversé sans un regard pour ses occupants le magnifique « sanctuaire des okapis », espace d’immersion abritant mammifères et oiseaux au cœur d’une ancienne carrière. Non seulement affligeant mais aussi suspect, très suspect… Et pendant ce temps-là, un canidé non identifié décime les troupeaux d’ovins dans le sud de l’Anjou. Le loup aurait-il fait - enfin - son retour dans l’Ouest malgré les mesures d’abattage dont l’espèce est aujourd’hui victime ?

MICMAC AU BIOPARC

La saison estivale étant propice à la lecture de romans policiers, les amateurs du genre et de sorties zoologiques passeront un agréable moment à suivre l’enquête de Julie Lantilly. Enseignant en retraite, l’auteur a potassé son sujet et retrace, au fil des interviews de son héroïne, l’histoire de l’établissement créé par Pierre Gay le 14 juillet 1961. L’occasion d’évoquer Asma la lionne asthmatique, l’évasion médiatisée fin juin 1969 de Kaa - un python réticulé de 6,12 m pour 90 kg - ou encore le succès du Safari Serpents auprès du grand public comme des scientifiques.

Personnages (re)connus

Gino Blandin a également glissé dans son livre des personnages bien réels tels la vétérinaire Florine Wedlarski ou François et Pierre Gay, les actuels directeurs du Bioparc. Quelques détails bien sentis n’échapperont pas aux lecteurs attentifs. Lors du drame initial, Pierre Gay se trouve en Bolivie afin de soutenir, dans le cadre des Projets Nature du zoo, le programme de conservation des aras de Lafresnaye (Ara rubrogenys) initié par l’association Armonia. Très plausible… Et tout en évoquant avec la journaliste enquêteuse son parcours et notamment sa visite marquante du zoo de Jersey en mai 1978, Pierre Gay doit s’interrompre pour répondre à un appel de son ami David. Le nom de ce dernier n’est pas mentionné, mais il pourrait bien s’agir - d’après quelques indices - de David Gill, le fondateur du South Lakes Safari Zoo en Angleterre. Là encore, très vraisemblable… Les spécialistes relèveront bien quelques accommodements avec la réalité pour les besoins de l’intrigue, comme le transfert d’un girafon du Niger. Le Bioparc soutient en effet la protection des dernières girafes d’Afrique de l’Ouest mais héberge seulement des représentants de la sous-espèce d’Afrique centrale (Giraffa camelopardalis antiquorum).

Après avoir dévoré d’une traite ce roman et découvert les clefs du mystère, les lecteurs gagneront à s’élancer sur les traces de Julie Lantilly dans les allées du Bioparc. Et à vérifier de visu si le lion Simba a bien la queue coupée…

NB. La petite tigresse de Sumatra Phuket a désormais quitté le Bioparc pour rejoindre, après un séjour à la réserve de la Haute-Touche dans l’Indre, leSouth Lakes Safari Zoo. La belle histoire continue.

BLANDIN Gino, Micmac au Bioparc, Geste Éditions, mars 2015, 304 p., 12,90 €.

Pour commander cet ouvrage, également disponible à la boutique du Bioparc : www.gesteditions.com

Turquie : la panthère d’Anatolie n’est peut-être pas éteinte

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Selon un responsable du ministère des Eaux et Forêts de la région turque de Malatya, le cadavre d’un jeune léopard appartenant à une sous-espèce considérée comme éteinte - la panthère d’Anatolie - aurait été découvert samedi 18 juillet 2015 près du village de Boğalı, situé en Anatolie orientale dans le district de Pülümür, province de Tunceli.

D’après les déclarations d’Ayhan Deligöz à l’agence de presse Anadolu, le corps de l’animal aurait séjourné longtemps dans le lit d’un ruisseau et perdu l’essentiel de son pelage. Les premiers tests auraient cependant établi qu’il s’agissait bien d’un félidé. Des scientifiques ont prélevé des échantillons de tissus et les ont adressés au Conseil de la recherche scientifique et technologique de Turquie (TÜBITAK). Les résultats des analyses devraient être connus d’ici un mois. Ne présentant apparemment aucune trace de coup violent ou de blessure par arme à feu et mesurant une cinquantaine de centimètres de long, le cadavre a été transféréà l’université Fırat de médecine vétérinaire, à Elazığ, afin d’y subir de nouveaux examens.

TIMBRES PANTHERE

Timbres édités en Azerbaïdjan en 1994 et en Ouzbékistan en 1997 (Photo DR).

S’appuyant sur des photos, le professeur Şağdan Başkaya de l’université technique Karadeniz de Trabzon aurait d’ores et déjà identifié l’animal comme étant un léopard d’Anatolie (Panthera pardus tulliana). En 2013, des chercheurs de cette université avaient assuré avoir obtenu 25 clichés de léopards grâce à des pièges photographiques installés durant trois mois dans une aire protégée, dont la localisation n’avait pas été révélée par souci de sécurité.

Prudence et controverses

Directeur régional du ministère des Eaux et Forêts, Ali Haydar Gürsönmez se montre plus prudent dans les colonnes du journal turc Daily Sabah : « Nous serions très heureux si cet animal se révélait être effectivement un léopard d’Anatolie. Les habitants assurent souvent en apercevoir dans la région. Rien n’est cependant avéré. »

Pour sa part, Özgür Keskin, le maire de Boğalı, précise que si personne n’a vu cet animal vivant, « les anciens du village observaient autrefois des léopardsdans les environs ».

Le 3 novembre 2013, un léopard avait été abattu par un berger dans la province de Diyarbakir, au sud-est du pays. Selon les autorités locales, aucun léopard n'avait plus été signalé dans cette zone depuis au moins un siècle. Il s’agirait vraisemblablement d’une panthère de Perse (Panthera pardus saxicolor).

SPECIMEN NATURALISE PRESENTE COMME UNE PANTHERE D'ANATOLIE

Exposé au Musée national géorgien de Tbilissi, ce spécimen naturalisé est présenté comme une panthère de l’Anatolie. Il pourrait toutefois appartenir à la sous-espèce de Perse (photo Jonathan Cardy).

Le statut de la sous-espèce anatolienne reste d’ailleurs l’objet de controverses. Ne figurant pas sur la liste des neuf sous-espèces reconnues par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), elle a été décrite pour la première fois en 1856 d’après la peau d’un animal tué près d’Izmir, port turc situé sur la mer Egée. L’aire de répartition de cette sous-espèce de grande taille, au « pelage cendré ou gris légèrement roussâtre » selon la description originelle du zoologiste français Achille Valenciennes (1794 - 1865), s’étendrait sur la partie égéenne et occidentale de la Turquie.

Si certains chercheurs englobent la panthère d’Anatolie au sein de la sous-espèce de Perse, d’autres défendent la thèse d’une sous-espèce distincte dont l’habitat se limiterait au sud-ouest de la Turquie, mais pas à sa partie orientale.

 Sources : UICN, Daily Sabah, AFP.


République tchèque: mort de l'un des cinq derniers rhinocéros blancs du nord

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Baptisée Nabire, une femelle rhinocéros blanc du nord (Ceratotherium simum cottoni) est morte dans la soirée du lundi 27 juillet 2015 au zoo de Dvůr Králové, en République tchèque. «  C'est une perte difficile à décrire », a déclaré Premysl Rabas, le directeur de cet établissement. Le zoo tchèque est le seul au monde à avoir réussi la reproduction en captivité de cette sous-espèce au bord de l'extinction (lire également http://biofaune.canalblog.com/archives/2014/12/15/31143824.html).

Nabire était née le 15 novembre 1983 au zoo de Dvůr Králové. Victime de soucis de santé depuis plusieurs années, elle serait morte après la rupture d’un kyste. « Sans sa teneur liquide, ce kyste pathologique pesait 40 kg. Il n'y a eu aucune possibilité de la guérir », a précisé le zoologue Jiri Hruby Nabire.

NABIRE

Nabire au zoo de Dvůr Králové (photo zoo de Dvůr Králové).

Aujourd’hui, seuls quatre rhinocéros blancs du nord survivent encore sur notre planète. Une femelle âgée, nommée Nola et née en 1974, est élevée au Diego Zoo Safari Park (États-Unis) où elle est arrivée en 1989 en provenance du zoo tchèque. Les trois autres spécimens sont hébergés dans la réserve kényane d'Ol Pejeta : Sudan, un mâle capturé très jeune le 19 novembre 1973, et deux femelles, Najin  - née en captivité en 1989 - et sa fille Fatu, âgée de 14 ans. Tous ont été transférés le 20 décembre 2009 depuis Dvůr Králové.

Selon le communiqué publié mardi 28 juillet 2015 par le zoo de Dvůr Králové, un des ovaires de Nabire et différents types de tissus ont été prélevés immédiatement après la mort de l’animal puis envoyés dans un laboratoire spécialisé en Italie.  «  Nous ressentons le devoir de faire tout pour sauver cette sous-espèce. Avec San Diego, nous sommes les seuls en mesure d’y parvenir grâce au matériel biologique collecté, même si l'espoir du succès reste mince », a précisé le directeur du zoo tchèque.

Source : AFP.

Arrêt sur images au zoo de Bâle : les travaux du futur espace des éléphants

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Alors que le cirque national suisse Knie a annoncé, au début du mois d’août 2015, la fin des numéros d’éléphants sous son chapiteau à l’issue de l’actuelle saison (*), le zoo de Bâle vit à l’heure des (grands) travaux de sa future installation des éléphants. Lancés en novembre 2013, ils doivent permettre d’améliorer les conditions d’élevage du troupeau d’éléphants africains hébergé par le parc rhénan.

Baptisé« Tembea », le nouvel espace doit ouvrir à l'automne 2016. Il couvrira 5.000 m2, soit plus du double de la superficie actuelle. Les pachydermes auront accès à trois enclos extérieurs, dotés chacun d'un revêtement au sol différent. Pour occuper les animaux et à des fins d’enrichissement, des rochers, des îlots d'arbres, des troncs, des bassins et des distributeurs de nourriture seront mis en place.

LES QUATRE ELEPHANTES DU ZOO DE BALE

Durant les travaux, les visiteurs peuvent observer les quatre femelles sur le plateau extérieur mais n’ont plus accès à la « maison des éléphants » (photo Ph. Aquilon).

Le public du Zolli pourra aussi observer les animaux dans leur pavillon. Par ailleurs et pour leur sécurité, les soigneurs ne seront plus en contact direct avec les éléphants mais en « contact protégé ».

Selon le site du zoo de Bâle, l’espace extérieur accueillera également des pintades et des cigognes blanches, tandis que des fourmis moissonneuses et des rats bruns seront visibles à l'intérieur du pavillon. En outre, des nids pour hirondelles et martinets seront posés à l'intérieur et sur les murs du bâtiment. Des abris pour chauves-souris sont aussi prévus.

Une course pour les éléphants

Le 23 octobre 2013, le parc suisse a transféré le mâle Yoga, né en 1996 au Botswana, au zoo suédois de Borås pour la durée des travaux. En revanche, les quatre femelles, Malayka, Heri, Maya et Rosy, nées respectivement en 1971, 1976, 1994 et 1995, sont restées au Zolli.

COMPTEUR DES PARRAINAGES

Situéà proximité du restaurant ouvert le 1er avril 2015, un comptoir affiche le nombre de parrains ayant contribué aux travaux du futur espace des éléphants africains. Arrêt sur décompte dans l’après-midi du mardi 11 août 2015 (photo Ph. Aquilon).

Le coût total de la nouvelle installation est estiméà 28 millions de francs suisses, environ 26 millions d’euros. Un système de parrainage permet aux visiteurs de contribuer au financement des travaux. Afin de collecter les fonds encore manquants, le zoo organisera samedi 29 août 2015, entre 8 heures et 16 heures, la première course bâloise pour les éléphants. Son principe est simple : les participants, enfants ou adultes, doivent trouver avant la course des parrains prêts à les soutenir en versant une certaine somme par tour ou un montant forfaitaire (renseignements et inscriptions : www.zoobasel.ch/elefantenlauf).

BIOFAUNE vous invite maintenant à découvrir en images, dans un nouvel album dédié, l’avancée des travaux de l’espace « Tembea ».

(*) Le cirque déclare vouloir aujourd'hui se concentrer sur le maintien d'un «groupe matriarcal d'éléphants avec des capacités d'élevage » dans l'enceinte du zoo familial de Rapperswil, situé sur la rive nord du lac de Zürich. D’une superficie annoncée de 6.500 m2, le  parc pour éléphants « Himmapan » a été inauguré en mars 2015 à Rapperswil.

INSTALLATIONS DU CIRQUE KNIE

Les installations du cirque Knie à Soleure le lundi 17 août 2015 (photo É. Aquilon).

Mercredi 5 août 2015, le mâle Thisiam a été transféréà Rapperswil en provenance du Śląski Ogród Zoologiczny de Chorzów en Pologne. Né le 4 mai 1998 au parc zoologique de Paris, Thisiam est l’un des fils du célèbre Siam. Avant de rejoindre l’établissement du bois de Vincennes le 2 août 1964, Siam avait été le premier mâle reproducteur du cirque Knie. Le 15 (ou le 16) février 1963, le cirque avait d’ailleurs obtenu la première naissance d’un éléphanteau [un mâle dénommé Sahib-Fridolin] en Suisse. Né de l’union entre Siam et la femelle Ceylon, Sahib-Fridolin a été transféré au zoo allemand de Leipzig le 21 novembre 1984. Le 3 juillet 1988, il a rejoint le zoo de Belfast (Irlande du Nord) puis le Cricket St Thomas Wildlife Park à Chard (Angleterre) le 2 mars 1991 où son euthanasie, le 23 décembre 1994, provoqua une vive polémique.

Bête du Gévaudan : un historien mène l’enquête

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Enflammant les imaginations depuis deux siècles et demi, l’énigme appartient à l’histoire de France tandis que le Gévaudan est devenu indissociable de la « Bête ». Plus ou moins sérieux, de nombreux auteurs ont tenté de lever le voile du mystère, beaucoup soutenant d’ailleurs l’avoir résolu. Les thèses crédibles le disputent aux hypothèses farfelues.

Ancien élève de lÉcole normale supérieure de la rue d’Ulm, agrégé d’histoire et professeur à l’université de Caen Normandie, Jean-Marc Moriceau aborde ce sujet avec la démarche du chercheur rompu aux exigences de la méthodologie historique. L’auteur a d’ailleurs la dent dure avec les autodidactes et les amateurs de mystères abordant « sans critique ni distanciation » les événements survenus entre juillet 1764 et juin 1767 dans le haut Gévaudan et la haute Auvergne. L’occasion, si besoin était, de rappeler l’inanité des accusations désignant la famille Chastel et/ou le comte de Morangiès. Tant pis pour les tenants de la théorie du complot…

LA BÊTE DU GÉVAUDAN

Pour autant, La Bête du Gévaudan La fin de l’énigme se destine au grand public souhaitant connaître la réalité de faits souvent déformés par la fiction. Paru en juin 2015,  ce petit ouvrage - entre guide chronologique et album abondamment illustré - bénéficie d’une cartographie permettant d’appréhender justement la géographie de l’affaire. Il se décline en une trentaine de chapitres avec, en point d’orgue, celui consacréà« l’identité de la Bête ». La révélation n’étonnera guère les lecteurs de quelques-uns des précédents livres de Jean-Marc Moriceau (Histoire du méchant loup. 3000 attaques sur l'homme en France XVe - XXe siècle, L'Homme contre le loup. Une guerre de deux mille ans,Vivre avec le loup ? Trois mille ans de conflit ou encore Le loup en questions, fantasme et réalité) ou des interviews données par l’historien dans la presse (*).

Pour l’auteur, le coupable tout désigné est évidemment le loup. Ou plutôt quelques loups, « moins d’une dizaine sans doute ». Le dévoiler n’enlève rien à la portée de ce livre dont l’intérêt tient moins à l’hypothèse finale qu’à sa chronologie rigoureuse et à son iconographie. La carte des principales « bêtes » anthropophages du XIIIe au XIXe siècle en France - comme la méconnue « Bête de Benais » ayant sévi dans l’ouest de la Touraine de 1693 à 1694 - replace ainsi la « Bête du Gévaudan » dans l’histoire environnementale.

Un doute raisonnable

Si pour M. Moriceau « le mystère n’est finalement pas si épais », le chercheur fait cependant montre de prudence et laisse la porte ouverte à l’implication éventuelle d’hybrides entre chiens et loups «métissés à une ou plusieurs générations ». En effet, l’animal abattu le vendredi 19 juin 1767 par Jean Chastel dans le bois de la Ténazeyre, sur le versant nord du mont Mouchet, se distingue d’un loup ordinaire, entre autres, par sa tête « monstrueuse » aux très longues oreilles, « une grande marque blanche en forme de cœur » sur le poitrail et des côtes décrites comme différentes de celles d’un loup. En outre, le rapport du notaire Marin note que « plusieurs chasseurs et beaucoup de personnes connaisseuses nous ont effectivement fait remarquer que cet animal n’a de ressemblance avec le loup que par la queue et le derrière ».

Par ailleurs, l’examen des mâchoires supérieure et inférieure ne permet pas de trancher, le  loup et le chien possédant des formules dentaires identiques. Malgré la densité de la population de loups dans la seconde moitié du XVIIIème siècle, la théorie d’individus hybrides apparaît donc recevable. Certes les époques diffèrent mais l’un des arguments actuels des partisans de la déclassification du loup comme espèce strictement protégée auprès de la Convention de Berne tient précisément à son hybridation avec le chien dans la péninsule italienne… La dépouille et le squelette du canidé tué par Chastel - dans l’estomac duquel fut retrouvé la tête du fémur d’un enfant - ayant disparus, il est impossible aujourd’hui d’émettre un jugement définitif.

BETE DU GEVAUDAN ESTAMPE

Estampe coloriée, 1765, BnF, Réserve des livres rares, coll. Gervais-François Magné de Marolles (1727-1792) (DR).

À raison, Jean-Marc Moriceau use donc du point d’interrogation pour le sous-titre de ce nouveau livre. La rigueur historique et la richesse des sources de cet ouvrage permettront à celles et ceux que la « Bête » intrigue de se plonger dans son histoire sur des bases solides et sérieuses. Même si la question de l’identité de la Bête demeure toujours une énigme…

MORICEAU Jean-Marc, La Bête du Gévaudan. La fin de l’énigme ?, juin 2015, Ouest-France, 142 p., 14,90 €.

(*) Dans une interview parue le dimanche 14 juin 2015 dans le quotidien régional Sud-Ouest, M. Moriceau évoquait notamment la présence de 350 loups sur le territoire français. Or, d’après une évaluation réalisée par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), la population française de Canis lupus compterait seulement 282 individus en 2015 contre 301 en 2014, soit une baisse de 6,3 %. Selon la lettre d’information InfoLoup publiée en mai-juin 2015 par la Direction régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dréal) Rhône-Alpes, cette chute est à«relier à la mortalité en hausse (tirs) et/ou à un bilan de reproduction moins excédentaire qu’auparavant ».

Par ailleurs, une modélisation réalisée par l’ONCFS avec l’université de Stockholm indique que l’abattage de 36 loups en 2015-2016 entraînerait un risque de 38 % de décroissance de la population lupine (LeMonde du 2 juillet 2015). À ce sujet, si l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) classe le loup en « préoccupation mineure »à l’échelle européenne, elle considère la population des Alpes centrales et occidentales comme « en danger », c’est-à-dire confrontée à un risque très élevé d’extinction à l’état sauvage (site de l’UICN consulté le 20 août 2015).

Des centaines d’œufs d’un criquet menacé déposés en Provence

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Ce mardi 25 août 2015, près de 500 œufs de criquets rhodaniens (Prionotropis hystrix rhodanica) ont été déposés, à quelques centimètres du sol, dans la plaine de la Crau. Provenant du parc zoologique de Thoiry (Yvelines), ces œufs ont été rapportés dans les Bouches-du-Rhône vendredi 21 août dernier par Laurent Tatin, biologiste à la réserve naturelle des Coussouls de Crau (RNC). En effet, début 2015, l’établissement francilien a mis en place un programme d’élevage ex situ destinéà la sauvegarde de  cette espèce menacée en dehors de son milieu naturel (voir http://biofaune.canalblog.com/archives/2015/02/09/31493504.html).

CRIQUET RHODANIEN

Communément appelé criquet de Crau, le criquet rhodanien est incapable de voler à cause de ses ailes atrophiées (Photo © A. Hochkirch - Cathy Gibault/Parc et Château de Thoiry).

En mai 2014, Cathy Gibault, vétérinaire au zoo de Thoiry et en charge des projets du fonds de dotation Thoiry Peaugres Conservation (TPC), avait contribuéàélaborer la stratégie de conservation du criquet rhodanien en collaboration avec la RNC et l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Depuis quelques années, cet insecte endémique du paléo-delta de la Durance connaît une chute très sévère de ses effectifs. Découvert en 1921 et protégé depuis 1976, ce criquet survit uniquement dans les zones steppiques arides et légalement protégées de la réserve naturelle des Coussouls de Crau. Afin d’enrayer son déclin, l’équipe de la RNC mène actuellement des recherches pour identifier les causes de la raréfaction de cet orthoptère de grande taille, classé« en danger critique d’extinction » depuis 2012 par l’UICN. Les individus qui verront le jour en avril 2016 permettront de renforcer sa fragile population.

RÉSERVE NATURELLE DES COUSSOULS DE CRAU

Classée en 2001, la réserve naturelle nationale des Coussouls de Crau couvre une surface de 7.411 hectares où vit une faune typique des milieux steppiques d’Europe occidentale (Photo © A. Hochkirch - Cathy Gibault/Parc et Château de Thoiry).

Autorisation exceptionnelle

Le criquet rhodanien s’avère particulièrement sensible à la fragmentation de son écosystème puisqu’il ne vole pas. Au cours de sa vie, un individu parcourt en moyenne une cinquantaine de mètres. Il est incapable de franchir des obstacles comme les routes ou les canaux pour coloniser de nouveaux milieux. Son habitat est menacé par l’extension des zones agricoles et industrielles.

En avril 2015, Laurent Tatin et Cathy Gibault avaient obtenu l’autorisation exceptionnelle de capturer quelques spécimens juvéniles dans la nature. Ces animaux avaient été directement transférés vers la station d’élevage de Thoiry où la ponte de très nombreuses oothèques, contenant chacune une quinzaine d’œufs, a été obtenue.

STATION D'ÉLEVAGE DU ZOO DE THOIRY

Jamais réussie ex situ, l’éclosion d’œufs de criquets rhodanien constitue un nouveau défi pour l’équipe du parc zoologique de Thoiry (Photo © A. Hochkirch - Cathy Gibault/Parc et Château de Thoiry).

À des fins d’observation scientifique, un certain nombre d’œufs ont été conservés par l’établissement zoologique et placés en incubation. Les jeunes, dont l’éclosion est attendue au printemps prochain, seront susceptibles d’être relâchés en milieu naturel. À ce jour, aucune éclosion n’a encore été enregistrée en captivité.

Le dernier rhinocéros de Sumatra « américain » va retourner en Indonésie

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Âgé de 8 ans, Harapan quittera prochainement les États-Unis à destination de l’Indonésie. Seul établissement américain à héberger encore un rhinocéros de Sumatra, le zoo de Cincinnati (Ohio) a annoncé mardi 25 août 2015 sa décision de transférer ce jeune mâle en Asie du Sud-Est. En effet, « l’Indonésie ne nous enverra pas de femelle », déplore sur son site Internet l’établissement zoologique américain, pionnier dans la reproduction de cette espèce en captivité, afin d’expliquer son choix. Le rhinocéros de Sumatra (Dicerorhinus sumatrensis) est classé« en danger critique d’extinction » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

HARAPAN ET EMI

Harapan, ici à l’âge de 19 jours, et sa mère Emi au zoo de Cincinnati en mai 2007 (photo wAlanb).

Selon Bambang Dahono Adji, directeur de la conservation de la biodiversité au ministère indonésien de l’environnement et des forêts, Harapan devrait arriver au plus tard début octobre au sanctuaire des rhinocéros du parc national de Way Kambas dans la province de Lampung, au sud de Sumatra. Il voyagera par avion jusqu’à Jakarta, sur l’île de Java, avant d’être convoyé par bateau vers le Sumatran Rhino Sanctuary. Le soigneur Paul Reinhart accompagnera le rhinocéros, lequel a déjà connu plusieurs transferts. Le 11 avril 2008, il avait quitté Cincinnati pour le White Oak Conservation Center (Floride) avant d’être confié au zoo de Los Angeles (Californie) puis de revenir dans l’Ohio en juillet 2013.

Retrouvailles familiales

Né le 29 avril 2007 à Cincinnati, Harapan retrouvera dans le sanctuaire indonésien son frère Andalas. Celui-ci est également venu au monde dans le zoo du Midwest, le 13 septembre 2001. Il était alors le premier rhinocéros de Sumatra à voir le jour en captivité depuis 112 ans. Tous deux nés à l’état sauvage, leurs géniteurs - le mâle Ipuh et la femelle Emi, donnèrent également naissance, le 30 juillet 2004, à une femelle prénommée Suci, morte le 30 mars 2014. Emi a disparu le 5 septembre 2009. Ipuh a été euthanasié le 18 février 2013, à l’âgé estimé d’au moins 33 ans.

RHINOCEROS DE SUMATRA AU ZOO DE CINCINNATI

Sa pilosité distingue le rhinocéros de Sumatra, avec la présence chez l’adulte d’un pelage clairsemé brun rougeâtre à noir sur la majeure partie du corps de l’animal comme chez ce spécimen du zoo de Cincinnati photographié en 2010 (photo Ltshears).

La mort de Suci fait d’ailleurs l’objet d’une accusation larvée de la part des responsables indonésiens. La femelle et sa mère Emi auraient succombéà une hémochromatose, maladie héréditaire autosomique provoquant une absorption excessive de fer par l'intestin et une accumulation toxique de ce métal dans divers organes. Pour Bambang Dahono Adji, la mort de Suci pourrait être liée à son régime alimentaire, trop riche en fer, au zoo de Cincinnati. Le directeur de la conservation de la biodiversité indonésien a même exprimé son inquiétude concernant la santé d’Harapan. « Nous ne voulons plus de mort prématurée de rhinocéros. Harapan ne doit pas devenir une nouvelle Suci. Nous avons donc insisté pour qu’il rejoigne son habitat originel. »

Éteint à l’état sauvage sur Bornéo

La population captive de rhinocéros de Sumatra s’élève aujourd’hui à neuf spécimens à travers le monde. Outre Andalas, le Sumatran Rhino Sanctuary héberge trois femelles dénommées Bina, Rosa et Ratu. Le 23 juin 2012, un mâle baptisé Andatu est né au sanctuaire de l’union entre Andalas et Ratu. Ces cinq spécimens appartiennent à la sous-espèce D. s. sumatrensis.

RATU ET ANDATU

La femelle Ratu et Andatu, âgé de quatre jours (photo International Rhino Foundation).

Trois autres individus - le mâle Tam et les femelles Iman et Puntung - vivent au sein du Borneo Rhinoceros Sanctuaryà Sabah, État de Malaisie orientale sur l'île de Bornéo. Ils sont peut-être les derniers représentants de la sous-espèce dite de l’Est ou de Bornéo (D. s. harrissoni). En avril 2015, le rhinocéros de Sumatra a été officiellement déclarééteint dans la nature à Sabah par les autorités malaisiennes. Toutefois, quelques animaux pourraient survivre à Kalimatan, la partie indonésienne de l'île de Bornéo. Il y a deux ans, l’antenne locale du Fonds mondial pour la nature (WWF-Indonesia) avait annoncé que des pièges photographiques avaient capturé, les 23 et 30 juin puis le 3 août 2013, des images d’au moins un rhinocéros dans une forêt de Kalimatan où des traces avaient été repérées en avril de la même année (pour découvrir ces brèves vidéos, suivre ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=0yZ0CciPYEU).

Jadis présente en Inde, au Bangladesh et au Bhoutan, la troisième sous-espèce (D. s. lasiotis) est présumée éteinte, même si une population relique pourrait subsister dans le nord de la Birmanie.

Accouplement consanguin

« Nous sommes très tristes de voir le programme d’élevage mené ici se terminer », a déclaréà l’agence Associated Press Terri Roth, directrice du centre de recherches sur la faune sauvage du zoo de Cincinnati. « C’est une perte énorme pour nous mais c’est aussi une bonne chose car Harapan pourra au moins contribuer à la survie de son espèce. »

En 2013, le parc animalier de l’Ohio avait, en vain, envisagé d’accoupler Harapan et sa sœur Suci. « Bien que notre centre de recherches ait pour principe de favoriser la diversité génétique et d’éviter les reproductions consanguines, les scientifiques sont parfois contraints à des exceptions sous peine de voir une espèce disparaître », assurait à l’époque Terri Roth. « Personne ne souhaite agir ainsi mais lorsqu’une espèce descend sous le seuil des 100 individus, faire naître le plus grand nombre de  jeunes possibles dans un minimum de temps l’emporte sur les considérations génétiques. »

En avril de la même année, un sommet de crise sur le rhinocéros de Sumatra, organisé au zoo de Singapour sous l’égide de l’UICN et réunissant plus de 130 scientifiques, avait révélé que la population totale de l’espèce, estimée alors entre 130 et 190 individus, était en réalité inférieure à 100 spécimens !

RHINOCEROS DE SUMATRA FEMELLE AU ZOO DE LONDRES (XIXEME SIECLE)

Le rhinocéros de Sumatra est considéré comme le plus primitif de tous. Les plus vieux spécimens retrouvés datent du Pléistocène moyen ou « Ionien » (entre - 781.000 et - 126.000 ans) mais l’apparition de cette espèce pourrait être encore plus ancienne. Ce cliché représente Begum, femelle appartenant à la sous-espèce septentrionale (D. s. lasiotis) et ayant vécu au zoo de Londres (Royaume-Uni) du 15 février 1872 au 31 août 1900. Capturée en janvier 1868, elle fut acquise par la Société zoologique de Londres le 14 février 1872 au marchand d’animaux Carl Jamrach pour la somme de 1.250 £ (photo DR).

Une proie facile

Les causes de la raréfaction du rhinocéros de Sumatra comme les stratégies de conservation à entreprendre font actuellement l’objet de controverses parmi les spécialistes.

D’après John Payne, directeur exécutif de l’organisation non gouvernementale Borneo Rhino Alliance (BORA), le déboisement n’aurait joué« aucun rôle » dans la disparition du rhinocéros de Sumatra sur l’île de Bornéo. « L’espèce était déjà condamnée avant 1930, après la grande vague de chasse destinée à alimenter le commerce de la corne avec la Chine, estime M. Payne. Se vautrant dans la boue ou somnolant en pleine journée, les rhinocéros ont été les grands animaux les plus faciles à tuer avec des lances, avant même l’arrivée des chiens de chasse et des armes à feu. » D’ailleurs, à en croire cet expert, la forêt pluviale tropicale couverte ne constituait sans doute pas l’habitat originel de ce rhinocéros.

RHINOCEROS DE SUMATRA SE BAIGNANT AU ZOO DE CINCINNATI

Doté de deux petites cornes, le rhinocéros de Sumatra est le moins imposant des cinq espèces actuelles de rhinocéros. Il atteint entre 1,10 m et 1,45 m au garrot. Tête et corps compris, il mesure de 2,30 m à 3,10 m de long. Sa masse oscille entre 500 kg et une tonne, avec une moyenne aux alentours de 700 à 800 kg. Ici, l’un des individus hébergés en 2007 au zoo de Cincinnati (photo Ltshears).

Néanmoins selon deux autres spécialistes -Benoît Goossens, directeur du Danau Girang Field Center, et Marc Ancrenaz, directeur scientifique de l’ONG Hutan, la déforestation et la fragmentation de son habitat ont bien joué un rôle, même secondaire, dans l’extinction du rhinocéros à Bornéo. « Elles ont permis aux braconniers d’accéder plus facilement à des forêts éloignées », souligne notamment M. Ancrenaz. Tous s’accordent cependant pour reconnaître que le braconnage reste la cause principale de la disparition du rhinocéros sur l’île.

Captivité et controverses

Par ailleurs, John Payne dénonce avec virulence certaines stratégies de conservation. « Au lieu de dépenser tant d’énergie à mettre en œuvre des zones protégées et des unités de protection n’ayant presque aucun animal à surveiller, il aurait été préférable de regrouper les animaux pour favoriser leur reproduction, affirmait-il en avril 2015 dans un article mis en ligne sur le site Mongabay. Lacommissionpour la survie des espèces de l'UICN et la majorité des ONG refusent d’admettre cet état de fait et défendent toujours le principe des aires protégées et des unités de protection. Pourtant les rhinocéros africains et le bison ont été sauvés de l’extinction non pas grâce aux réserves et aux équipes de protection mais parce que des spécimens ont été capturés puis se sont multipliés dans des fermes d’élevage. »

Au début des années 1980, un programme de sauvegarde en captivité du rhinocéros de Sumatra avait cependant été initié, avec la capture de 40 individus entre 1984 et 1996. Malheureusement, avant la venue au monde d’Andalas à Cincinnati en 2001, aucune naissance n’avait été enregistrée et le projet était majoritairement considéré comme un échec. En 1997, le groupe des spécialistes des rhinocéros asiatiques à l'UICN estima que ce programme n’avait « mêmepas permis le maintien de l'espèce en captivité dans les limites acceptables de la mortalité » après la mort de 50 % des animaux concernés. À l’automne 2003, cinq spécimens, appartenant à la sous-espèce nominale (Dicerorhinus sumatrensis sumatrensis) et maintenus dans un centre de conservation situé dans l’État fédéré malais de Selangor, succombèrent à une épidémie de surra, une maladie infectieuse provoquée par une espèce de trypanosome (Trypanosoma evansi). Le premier individu mourut le 30 octobre et les deux derniers 18 jours plus tard.

RHINOCEROS DE SUMATRA DANS LE PARC NATIONAL DE WAY KAMBAS

Rhinocéros de Sumatra photographié en 2008 dans le parc national de Way Kambas, à Sumatra (photo Willem v Strien).

Fécondation in vitro

En accord avec le gouvernement malais et en collaboration avec le Leibniz Institute for Zoo and Wildlife Research (IZW) à Berlin, BORA envisage de recourir à la fécondation in vitro et espère obtenir un premier embryon « avant la fin de 2015, même si cela sera difficile ». En effet, Puntung et Iman, les deux femelles hébergées au Borneo Rhinoceros Sanctuary, souffrent respectivement de kystes et de tumeurs à l’utérus. « Grâce à cette technologie, elles pourraient donner naissance à un petit tous les trois ans », assure John Payne. Très coûteuse, cette tentative serait en grande partie financée par le conglomérat Sime Darby, l’un des plus importants producteurs d’huile de palme au monde…

En revanche, d’autres défenseurs de l’environnement comme Marc Ancrenaz préconisent le regroupement de tous les spécimens captifs en Indonésie pour tenter de sauver l’espèce dans son ensemble. Lors du sommet de 2013 à Singapour, les parties prenantes avaient décidé de considérer tous les rhinocéros de Sumatra captifs comme une seule population et de ne plus tenir compte des sous-espèces ou des propriétés nationales. Cet engagement n’a, pour l’heure, débouché sur aucune action commune entre l’Indonésie et la Malaisie.

Sources : Associated Press, Mongabay, zoo de Cincinnati, Asian Rhino Project,  Save the Rhino, The Sumatra rhinoceros international studbook, ZECCHINI Alain, Le rhinocéros. Au nom de la corne d’Alain Zecchini, 1998, L’Harmattan, 170 p., Wikipédia.

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